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Réfer. : AL0902B
Auteur : Hermès Trismégiste.
Titre : Les Sept Chapitres,
S/titre : attribués à Hermès.
Editeur : B. d. Ph. C. T-I.
Date éd. : 17xx .
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16
L E S
S E P T C H A P I T R E S,
ATTRIBUES A HERMES
---------------------
CHAPITRE PREMIER

Oici ce que dit Hermès.
Pendant le longtemps que j'ai
vécu, je n'ai cessé de faire
des expériences; & j'ai toujours
travaillé sans m'épargner.
Je ne tiens cet Art & cette Science
que de la seule inspiration de Dieu. C'est
lui qui a daigné la révéler à son Serviteur.
C'est lui qui a donné à ceux qui savent
se bien servir de leur raison, le
moyen de connaître la vérité; mais il n'a
jamais été cause que personne ait suivi
l'erreur ni le mensonge.
Pour moi, si je ne craignais le jour
du Jugement, & d'être damné pour avoir
caché cette Science, je n'en aurais rien
dis; & je n'écrirais point, pour l'enseigner
gner
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CHAPITRE I. 17
à ceux qui viendront après moi.
Mais j'ai voulu rendre aux Fidèles ce
que je leur devais, en leur enseignant
ce que l'Auteur de la fidélité a daigné
me révéler.
Ecoutez donc, Fils des sages Philosophes,
nos Prédécesseurs, non pas corporellement
ni inconsidérément la Science
des quatre Eléments (1) qui sont passibles,
& qui peuvent être altérés & changés
par leurs Formes; & qui sont cachés
avec leur action.
Car leur action est cachée dans notre
Elixir; parce qu'il ne saurait agir, s'il
n'est composé
de l'union très exacte de ces
mêmes Eléments; & il n'est point parfait,
qu'il n'ait passé par toutes ses Couleurs,
dont chacune marque la domination d'un
Elément particulier.
Sachez, Fils des Sages, qu'il y a une division
(1) Les Philosophes appellent | qu'à dissoudre l'Or, qu'ils
|
ainsi leur science, | appellent Terre, ou Corps,
|
parce qu'ils assurent qu'elle | & à le réduire en Mercure
|
ne consiste qu'à transmuer | (ce qui ne peut se faire
|
les Eléments. Cette Transmutation | que par leur premier Mercure,
|
se fait en changeant | qu'ils appellent Eau.
|
la Terre en Eau, & | à cause qu'il est liquide &
|
l'Eau en Terre, parce qu'il | qu'il est le véritable & unique
|
n'y a que ces deux Eléments | Dissolvant de l'Or)
|
sensibles & apparents, & | puis à changer en Terre ou
|
que les deux autres, qui | en poudre ces deux Mercures,
|
sont l'Air & le Feu, sont | qui sont Eau, & parfaitement
|
renfermés en ces deux-là. | unis ensembles, & que
|
Ainsi, pour faire l'Oeuvre | le Trévisan appelle Mercure
|
des Philosophes, il n'y a | double.
|
Tom. I. | B
|
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18 LES SEPT CHAPITRES.
de l'Eau des anciens Philosophes;
qui la partage en quatre autres choses.
Une est à deux, & trois à une. Et à la
Couleur de ces choses, c'est-à-dire à l'Humeur
qui coagule, appartient la troisième
partie, & les deux autres troisièmes
parties sont pour l'Eau. Ce sont là les
poids des Philosophes. (1)
Prenez de l'Humeur une once & demie,
& de la Rougeur méridionale, ou de
l'Ame du Soleil la quatrième partie, qui
est une demie-once, & de la Gomme
orangée aussi une demie-once, & la moitié
d'Orpiment, qui font huit, c'est-à-dire
trois onces.
(1) L'Auteur détermine | n'y ayant effectivement
|
ici quelle doit être la | que les choses liquides, &
|
dose, ou la quantité des | encore celles qui sont de
|
deux Matières, qui entrent | même nature, qui puissent
|
dans la Composition | s'unir parfaitement,
|
de l'Oeuvre. Il appelle | & faire une véritable
|
cette Composition l'Eau | Composition. Et c'est sans
|
des anciens Philosophes, | doute pour cette raison
|
ou à cause que leur premier | qu'il nomme le Soufre,
|
Mercure, qui est | ou l'Or, la Teinture des
|
leur Eau, est la première & | Matières, & l'Humeur
|
principale partie de cette | coagulante, parce que c'est
|
Composition, & qu'il y est | le Soufre qui teint & qui
|
en double portion du Soufre, | fixe. D'où il est évident
|
ou de l'Or, qui en est | qu'il faut nécessairement
|
l'autre partie, ce qui est, dit- | que l'Or soit dissous, pour
|
il, le poids des Philosophes; | pouvoir être exactement
|
ou bien, parce que le mélange | uni avec le Mercure, qui
|
du premier Mercure | est son Dissolvant, & par
|
& de l'Or ne peut point | conséquent, pour faire ensemble
|
être appelé la Composition | la véritable Composition
|
de l'Oeuvre, qu'après | de l'Oeuvre.
|
que l'Or est dissous; |
|
@
CHAPITRE I. 19
Et sachez que la Vigne des Sages se
tire en trois, & que son vin est parfait à
la fin de trente.
Concevez comment l'Opération s'en
fait. La Cuisson le diminue
en quantité,
& la Teinture l'augmente
en qualité;
parce que la Lune commence à décroître
après son quinzième jour, & elle croît
au troisième. C'est donc là le commencement
& la fin.
Voici, je viens de vous déclarer ce
qui avait été celé. Car l'Oeuvre est
avec vous & chez vous; de sorte que la
trouvant en vous-même,
où elle est continuellement,
vous l'avez aussi toujours
quelque part où vous soyez, soit en Terre
ou en Mer. (1)
Gardez donc l'Argent-vif, qui se fait
dans les Lieux ou Cabinets intérieurs,
c'est-à-dire
dans les Principes des Métaux,
qui en sont composés, & dans lesquels il est
coagulé. Car c'est là cet Argent vif, que
(1) M. Salomon pense | ma pensée à celle de ce
|
que par ces paroles, l'Oeuvre | savant Commentateur, je
|
est avec vous & chez | dirais qu'il me semble
|
vous, l'Auteur veut dire | qu'Hermès, ou celui qui
|
que dans la conformation | a écrit sous son nom, entend
|
de nos Corps & dans le | parler ici de l'Esprit
|
changement des aliments, | Universel (principe essentiel
|
qui se fait continuellement | de notre vie,) que nous
|
en notre substance, il se | respirons en tout temps &
|
trouve une représentation | en tout lieux, & qui est
|
de l'Oeuvre des Philosophes. | la véritable origine du
|
Si j'osais ajouter | Mercure Philosophique.
|
| B ij
|
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20 LES SEPT CHAPITRES.
l'on dit être de la Terre qui reste.
Que celui donc qui n'entend pas mes
paroles, en demande l'intelligence à
Dieu, qui ne justifie les oeuvres d'aucun
Méchant, & qui ne refuse à nul Homme
de bien la récompense qui lui est due.
Car j'ai découvert tout ce qui avait
été caché de cette Science; j'ai déclaré
un très grand Secret; & j'ai dit même
toute la Science à ceux qui sauront l'entendre.
Vous donc, Inquisiteurs de la Science,
& vous, Enfants de la Sagesse, sachez que
le Vautour étant sur la Montagne, crie
à haute voix: Je suis le blanc au noir, &
le rouge du blanc, & l'orangé du rouge.
Certes je dis la vérité.
Sachez aussi que le Corbeau qui vole
sans ailes dans la noirceur de la nuit, &
dans la clarté du jour, est la tête, ou
le
commencement de l'Art.
Le Coloris se prend de l'amertume qui
est en son gosier, & la teinture est sortie
de son Corps, & il se tire une Eau véritable
& toute pure de son dos.
Comprenez donc ce que je dis, & recevez
par même moyen le Don de Dieu
que je vous communique: Mais celez-le
à tous les Imprudents.
C'est une Pierre que l'on doit honorer,
qui est cachée dans les Cavernes ou
dans
@
CHAPITRE I. 21
le profond des Métaux. Sa couleur la rend
éclatante; c'est une Ame, ou
un Esprit
sublime, & une Mer ouverte.
Voici, je vous l'ai déclarée; rendez
grâces à Dieu, de ce qu'il vous a enseigné
cette Science: car il aime ceux qui
ont de la reconnaissance de ses grâces.
Mettez donc cette Pierre, c'est-à-dire
sa Matière, dans un feu humide, & l'y faites
cuire. Ce feu augmente la chaleur de
l'humidité, & il tue la sécheresse de l'incombustion,
jusqu'à ce que la racine
paraisse: C'est-à-dire ,
jusqu'à ce que le
Corps soit résolu en son Mercure. Après
cela faites sortir de cette Matière la rougeur,
& sa partie légère,
Continuant à le
faire, jusqu'à ce qu'il n'y en ait que
la troisième partie qui reste.
Enfants des Sages, la raison pour laquelle
on a appelé les Philosophes (
Envieux)
ce n'a pas été à cause qu'ils aient jamais
eu dessein de rien celer aux gens de bien,
ni à ceux qui vivent pieusement, ni aux
légitimes &
véritables Enfants de la
Science, ni aux Sages.
Mais parce qu'ils la cachent aux Ignorants.
C'est-à-dire,
à ceux qui n'en savent
pas assez pour la connaître, aux Vicieux,
& à ceux qui vivent sans loi &
sans charité; de crainte que par ce moyen
les Méchants ne devinssent puissants pour
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22 LES SEPT CHAPITRES.
commettre toutes sortes de crimes, dont
les Philosophes seraient responsables à
Dieu. Car tous les Méchants sont indignes
de
posséder la Sagesse.
Sachez que je nomme cette Pierre par
son nom. Car les Philosophes l'appellent
la Femme de la Magnésie, ou la
Poule, ou la Salive blanche, le Lait des
choses volatiles, & la Cendre incombustible,
afin de la cacher aux Imprudents,
qui n'ont ni sens, ni loi, ni humanité.
Mais moi, je l'ai nommée d'un nom
fort connu, en l'appelant la Pierre des
Sages. Conservez donc dans cette Pierre
la Mer, le Feu, & le Volatil du Ciel,
jusqu'au moment de sa sortie.
Or je vous conjure tous, ô Fils des
Philosophes! au nom de notre Bienfaiteur,
qui vous fait une grâce si singulière
de ne jamais déclarer le nom de cette
Pierre à aucun Fou, à aucun Ignorant,
ni à aucun qui en soit indigne.
Pour ce qui est de moi, je puis dire
que personne ne m'a rien donné que je
ne lui aie rendu tout ce qu'il m'a donné.
Je n'ai jamais manqué au respect que je
lui devais; & j'ai toujours parlé fort
honorablement de lui.
Mon Fils, cette Pierre est enveloppée
de plusieurs Couleurs, qui la cachent;
mais il n'y en a qu'une seule, qui marque
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CHAPITRE I. 23
sa naissance, & son entière perfection.
Connaissez qu'elle est cette Couleur, &
n'en dites jamais rien.
Avec l'aide de Dieu tout-puissant,
cette Pierre vous délivrera & vous garantira
de maladies pour grandes qu'elles
soient; elle vous préservera de toutes
tristesse & afflictions, & de tout ce qui
pourrait vous nuire au corps & à l'esprit.
Elle vous conduira encore des ténèbres
à la lumière, du désert à la maison,
& de la nécessité à l'abondance.
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C H A P I T R E II.
M ON Fils, avant toutes choses, je
vous avertis de craindre Dieu, car
c'est lui qui fera réussir votre Opération,
& qui fera l'Union de chaque Elément
séparé.
Mon Fils, comme je ne vous crois
pas privé de raison, ni insensé, vous devez
raisonner sur tout ce que l'on vous
dira de notre Science, Recevez même
mes exhortations & méditez si bien les
leçons que je vous fais, que vous les
entendiez, comme si c'était vous-même
qui en fussiez l'Auteur.
Car comme ce qui est naturellement
chaud ne peut devenir froid, sans être
altéré; de même celui qui use bien de sa
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24 LES SEPT CHAPITRES.
raison, doit fermer la porte à l'ignorance,
de peur que se croyant assuré; il ne
soit trompé.
Mon Fils, prenez le volatil, submergez-le
lorsqu'il vole, & séparez-le de
sa rouille, qui le tue ; ôtez-la, & chassez-la
de lui, afin qu'il devienne vivant,
comme vous le souhaitez; après quoi
il ne faut plus qu'il s'élève dans le Vaisseau;
mais il doit retenir &
fixer visiblement
ce qu'il y a de volatil.
Car si vous le tirez d'une seconde affliction,
après l'avoir tiré d'une première,
& si pendant les jours, dont vous
savez le nombre, vous le gouvernez
avec adresse, ce vous sera une compagnie
telle qu'il vous la faut, & en le séparant,
vous en serez le maître, & il vous
servira d'ornement.
Mon Fils, séparez du rayon son ombre,
& ce qu'il a d'impur; parce qu'il y
a des nuées au-dessus de lui, qui le salissent,
& qui l'empêchent de luire, à cause
qu'il est brûlé par l'oppression, & par
sa rougeur.
Prenez cette rougeur, qui a été corrompue
par l'Eau, de même que la cendre
vive contient en soi du feu. Que si
vous l'ôtez toujours, jusqu'à ce que la
rougeur soit nette & purifiée; vous ferez
une union, dans laquelle il s'échauffe
& se repose. Mon
@
CHAPITRE II. 25
Mon Fils, remettez dans l'Eau, pendant
les trente jours que vous savez,
le Charbon de qui la vie est éteinte. Ainsi,
ô notre Oeuvre! vous reposant sur le
puis de cet Orpiment, qui n'a point
d'humidité.
Voici, j'ai comblé de joie les coeurs
de ceux qui espèrent en vous,
ô notre
Elixir! & j'ai réjoui les yeux de ceux
qui vous considèrent, par l'espérance du
bien que vous renfermez en vous-même.
Mon Fils, soyez assuré que l'Eau était
premièrement dans l'Air, puis dans la
Terre. C'est pourquoi faites-la aussi remonter
en haut par ses conduits, & changez-la
avec discrétion, & ensuite unissez-
la peu à peu à son premier Esprit rouge,
qui a été ramassé.
Mon Fils, je vous apprends que l'Onguent
de notre Terre est un Soufre,
Orpiment, Gomme, Colchotar, qui est
Soufre, Orpiment, & même
divers Soufres,
& semblables choses; chacune desquelles
est plus vile que n'est l'autre, &
il y a diversité entre-elles.
De ces choses vient encore l'Onguent
de la Colle, qui est Poils, Ongles &
Soufre. De là vient aussi l'Huile des pierres,
& le Cerveau qui est Orpiment. De
la même vient l'Ongle des Chats qui est
Gomme, & l'Onguent des blancs, &
Tom. I. C *
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26 LES SEPT CHAPITRES.
l'Onguent des deux Argents vifs Orientaux,
qui pourchassent les Soufres, contiennent
les Corps.
Je dis de plus que le Soufre teint & fixe,
& qu'il est contenu &
renfermé, &
qu'il se fait par l'union de Teintures.
Or les Onguents (1) teignent & fixent
ce qui est contenu dans le Corps; &
c'est par ce seul moyen que se fait l'union
des choses volatiles avec les Soufres
alumineux, qui retiennent & fixent
tout ce qu'il y a de volatil.
Mon fils, la disposition, que les
Philosophes recherchent, est unique de notre
Oeuf, ce qui ne se rencontre pas en
l'oeuf de Poule. Il y a néanmoins quelque
ressemblance en notre divine Oeuvre,
qui est l'ouvrage de la Sagesse, &
l'oeuf de Poule; en ce qu'en l'une &
en l'autre les Eléments y sont unis & arrangés
avec ordre.
Sachez donc, mon Fils, que de cette
ressemblance, & de cette proximité
de nature, l'on peut tirer un grand avantage
pour la connaissance de notre Oeuvre.
Car dans l'oeuf de Poule il y a une
substance qui représente la matière
aqueuse
de l'Oeuvre, qu'on appelle Spirituelle
ou Esprit; il y en a une autre semblable
à l'Or,
qui est la Terre des Philosophes.
(1) Le Soufre des Philosophes.
@
CHAPITRE II. 27
Et en ces deux Substances on remarque
visiblement l'assemblage & l'union des
quatre Eléments. (1)
(1) La comparaison que | re vivifie l'Or, disent les
|
les Philosophes font de | Philosophes, & qu'il a en
|
leur grand Oeuvre avec | lui tout ce qui est nécessaire
|
l'oeuf, est fort juste, mais | pour la composition &
|
non pas tant à mon avis, | perfection de l'Oeuvre.
|
parce que les quatre Eléments | Ce qui a donné lieu à cette
|
se trouvent dans leur | Maxime; Tout ce que
|
Oeuvre de même que dans | les Sages cherchent, est
|
l'oeuf, qu'à cause qu'il y | dans le Mercure, de même
|
a deux Matières dans | que le blanc de l'oeuf
|
l'Oeuvre des Philosophes, | a en soi tout ensemble & la
|
leur Mercure & l'Or; | matière dont est entièrement
|
comme il y en a deux dans | formé le Poulet, &
|
l'oeuf, le Jaune & le Blanc. | le principe qui lui donne
|
Que ces Matières ont | la vie. Secondement l'Or,
|
grand rapport les unes aux | qui est l'autre Matière
|
autres, & qu'il y a beaucoup | de l'Oeuvre, ressemble
|
de ressemblance entre-elles; | pareillement au jaune
|
outre les autres | de l'oeuf, tant par sa
|
choses qui contribuent à | Couleur & sa consistance,
|
cette conformité. Car premièrement | qui est plus resserrée
|
le Mercure des | & plus solide que
|
Philosophes étant, selon | n'est celle du Mercure,
|
Philalèthe, semblable à | qu'à cause qu'il lui sert
|
l'Argent vif vulgaire, & | de ferment, & même de
|
en ayant l'apparence & | nourriture; ce qu'il fait
|
toutes les propriétés, il | en l'épaississant, le fixant,
|
représente parfaitement le | & s'unissant intimement à
|
blanc de l'oeuf non seulement | lui: comme le jaune de
|
parce que, comme | l'oeuf est plus épais que le
|
lui il est blanc, aqueux, | blanc, & que dans l'oeuf
|
liquide, & d'une consistance | il sert d'aliment au Poulet,
|
un peu épaisse, & que | qui se forme du blanc,
|
d'ailleurs dans la composition | jusqu'à ce qu'il soit éclos.
|
de l'Oeuvre, il y | Ainsi le jaune de l'oeuf en
|
a plus de ce premier Mercure | nourrissant le Poulet, &
|
que d'Or, comme dans | s'unissant à sa substance,
|
l'oeuf le blanc est en plus | reçoit la vie; comme l'Or,
|
grande quantité que n'est | selon les Philosophes, est
|
le jaune; mais principalement | vivifié, lorsqu'il est si exactement
|
parce que le Mercu- | uni à leur Mercure,
|
| C ij
|
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28 LES SEPT CHAPITRES.
Le Fils a demandé à Hermès: Les Soufres,
qui conviennent à notre Oeuvre,
sont-ils célestes ou terrestres? Et Hermès
répondit: Il y en a de célestes, & il
en a aussi qui sont terrestres. (2)
Le Fils lui dit là-dessus: Mon Père,
que tous deux ne | principales Opérations de
|
sont plus qu'une même | leur Oeuvre. Comme la
|
Substance. Enfin, comme | Poule échauffe doucement
|
le blanc & le jaune de | ses oeufs dans son nid en
|
l'oeuf sont contenus dans | les couvant pour réveiller
|
une taie, & dans la coque | & faire agir le principe de
|
qui enveloppe le tout; de | vie qui est renfermé dans
|
même aussi les Philosophes | le blanc, & qui doit faire
|
renferment la composition | la conformation de toutes
|
de leurs deux Matières | les parties du Poulet, &
|
dans un vaisseau de | l'animer; Et comme la
|
verre, bouché fort exactement, | Poule ne cesse de couver
|
& que pour cette | les oeufs, jusques à ce que
|
raison, & pour sa figure | les Poulets soient arrivés
|
ovale, ils appellent leur | à leur terme & qu'ils
|
Oeuf; & ils le posent | soient éclos; les Philosophes
|
dans un Fourneau, sur une | continuent toujours
|
écuelle pleine de cendres, | à entretenir le feu dans
|
qui servent d'intermède | leur Fourneau jusqu'à ce
|
comme les Artistes l'appellent, | que leur Elixir qu'ils appellent
|
c'est-à-dire de | aussi leur Poulet,
|
milieu entre le Feu & le | soit arrivé au temps limité
|
Vaisseau, & ces deux choses | de sa perfection. M.
|
dit Flamel en son | Salomon.
|
Poème, sont comme la | (2) Le Soufre céleste
|
Paille et le Nid de la Poule | est celui que contient l'Esprit
|
où est l'oeuf qu'elle couve. | Universel, & qu'on
|
Les Philosophes entretiennent | en tire facilement. Le Soufre
|
au commencement | terrestre est celui qu'on
|
dans leur fourneau | extrait de l'Or, lorsqu'on
|
un feu doux & continuel, | le réincrude on remet dans
|
pour exciter peu à peu les | ses premiers Principes par
|
Esprits qui sont dans leur | le moyen du Mercure des
|
Mercure, & qui doivent | Philosophes, son unique
|
faire la dissolution de l'Or | & véritable Dissolvant.
|
& le vivifier, qui sont les |
|
@
CHAPITRE II. 29
je crois que le Ciel est le coeur dans les
choses supérieures, & que la Terre l'est
dans les inférieures. A quoi Hermès répondit:
Vous ne dites pas bien. Car le
Mâle est le Ciel de la Femelle, & la Femelle
est la Terre du Mâle.
Le Fils lui demanda ensuite: Lequel
des deux est le plus digne d'être le Ciel,
ou d'être la Terre? Hermès répondit: ils
ont besoin l'un de l'autre, parce qu'en
tous les Préceptes l'on ne commande
que la médiocrité. Comme qui dirait:
Le Sage commande à tous les Hommes.
Car le médiocre est le meilleur; parce
que quelque Nature que ce soit s'associe
& s'unit beaucoup mieux avec celle
qui lui est semblable. Et notre Science,
qui est appelée Sagesse, nous fait voir
qu'il n'y a que les choses médiocres &
tempérées qui s'unissent.
Le Fils dit alors: Mon Père, lequel de
ceux-là est le médiocre? Hermès répondit:
A chaque Nature il y en a trois de
deux. L'Eau est premièrement nécessaire,
puis l'Onguent ou Soufre, & les fèces
ou impuretés demeurent en bas.
Or le Dragon se trouve en toutes ces
choses. Les ténèbres sont sa maison, &
la noirceur est en elles. Et par cette noirceur,
il monte en l'Air. Et cet Air est
le Ciel, ou il commence de paraître
C iij
@
30 LES SEPT CHAPITRES.
comme en son Orient. Mais tandis que
ces choses s'élèvent comme une fumée
&
s'évaporent, elles ne sont pas permanentes
ni fixes.
Mais faites rasseoir la fumée de l'Eau;
ôtez la noirceur à l'Onguent, & chassez
la mort des fèces &
de l'impureté. Et
la dissolution étant faite par la victoire
que les deux Matières ont remportées l'une
sur l'autre, & s'étant unie ensuite, de
sorte qu'elles s'entre-tiennent toutes
deux, alors elles sont vivantes.
Mon Fils, vous devez savoir que
l'Onguent médiocre, c'est-à-dire le Feu,
tient le milieu entre les fèces & l'Eau,
& c'est lui qui recherche l'Eau; parce
qu'on les appelle Onguent & Soufre,
& qu'il y a une grande affinité entre le
Feu, l'Huile & le Soufre; car de même
que le Feu jette une flamme, aussi fait
le Soufre.
Sachez, mon Fils, que toutes les sagesses
du monde sont au-dessous de la sagesse
que je possède; & que tout ce que son
Art peut faire, consiste à rendre ces
Eléments occultes & cachés; ce qui est
une chose merveilleuse.
Celui donc qui désire être introduit
en cette sagesse cachée que nous possédons,
doit fuir le vice d'arrogance,
être Pieux, être Homme de bien, d'un
@
CHAPITRE II. 31
profond raisonnement, & garder les Secrets
qui lui ont été découverts.
Je vous avertis encore mon Fils, que
qui ne sait pas mortifier, faire une
nouvelle
génération, vivifier les Esprits,
purifier, introduire la lumière, jusques
à ce que les Eléments se combattent,
qu'ils soient colorés, & qu'ils soient
nettoyés de leurs taches, telles que sont
la noirceur & les ténèbres; celui-là ne
sait rien, & n'avance rien. Mais s'il
sait faire ce que je viens de dire, il
sera élevé en grande dignité, tellement
que les Rois auront de la vénération
pour lui.
Mon Fils, nous sommes obligés de
garder ces Secrets, & de les celer à tous
les Méchants, & à ceux qui n'ont pas assez
de sagesse, ni assez de discrétion
pour
les garder, & en bien user.
Vous devez savoir de plus que notre
Pierre est faite de plusieurs choses, & de
plusieurs couleurs; qu'elle est faite &
composée de quatre Eléments unis; que
nous devons séparer ces Eléments, les
désunir, & comme autant de pièces différentes,
les mettre chacun à part.
Nous devons aussi mortifier en partie
la Nature ou les Principes, qui sont en
cette Pierre; conserver l'Eau & le Feu
qui demeure en elle, & qui sont faits des
C iiij
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32 LES SEPT CHAPITRES.
quatre Eléments; & retenir
ou fixer leurs
Eaux par son Eau, laquelle n'est pas pourtant
Eau quant à la forme
extérieure, ou
apparente; mais un Feu, qui monte sur
les Eaux, & qui les contient dans un
vaisseau, qui doit être entier &
sans fêlure,
de peur que les Esprits ne s'échappent
& ne sortent des Corps. Etant ainsi
retenus, ils deviennent tingeants & fixes.
O bénite forme ou apparence d'Eau
Pontique, qui dissous les Eléments! Or
afin qu'avec cette Ame aqueuse nous
possédions la Forme sulfureuse, c'est-
à-dire
afin que la composition, qui était
semblable à de l'Eau, devienne Terre ou
Soufre, il faut que nous la mêlions avec
notre Vinaigre.
Car lors que par la puissance & la
vertu de l'Eau le Composé est dissous,
c'est alors la clef,
ou le moyen assuré
pour le rétablir & le refaire. Alors la
Mort & la noirceur les quittent, & la
Sagesse,
c'est-à-dire l'Ouvrage de la
Sagesse, commence de paraître. Je veux
dire,
que l'Artiste connaît par là, qu'il a
bien & sagement conduit son Opération,
& qu'il est dans la véritable voie que
les Philosophes ont tenue.
@
CHAPITRE III. 33
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C H A P I T R E III.
S Achez, mon Fils, que les Philosophes
font des liaisons ou des noeuds
forts & serrez pour combattre contre le
feu; parce que les Esprits aiment d'être
dans les Corps qui sont lavez, & ils se
plaisent à y demeurer.
Et dès que les Esprits sont unis à eux,
ces Esprits les vivifient, & ils demeurent
en eux, & les Corps retiennent ces Esprits,
sans jamais les quitter.
Alors les Eléments, qui sont morts,
deviennent vivants, & ils teignent les
Corps composés de ces Eléments; ils
sont altérés & changés, & ils font des
oeuvres admirables, & qui sont permanentes,
comme dit le Philosophe. (1)
O forme aqueuse d'Eau permanente,
qui crée les Eléments dont est fait notre
Roi, & qui par un régime tempéré ayant
acquis la Teinture, & t'étant unie à tes
Frères, te reposes ensuite,
parce que tu
es parvenue à ta fin.!
(1) S'il est vrai qu'Hermès | Philosophes, qui pour cette
|
ait été le premier des | raison l'appellent Père,
|
Philosophes, comme c'est | les derniers mots de ce
|
l'opinion commune, fondée | verset font voir que cet
|
sur tous les Ecrits que | Ouvrage n'est pas de lui
|
nous avons des anciens |
|
@
34 LES SEPT CHAPITRES.
Notre Pierre très précieuse, étant jetée
sur le fumier, est très chère & tout
ensemble vile & même très vile,
parce que nous devons tout à la fois
mortifier & vivifier deux Argents-vifs,
qui sont l'Argent vif de l'Orpiment, &
l'Argent-vif Oriental de la Magnésie.
O que la Nature est une grande Ouvrière!
puisqu'elle crée les Principes naturels;
qu'elle retient ce que ces Principes
ont de médiocre, après les avoir
séparés
des crasses, & impuretés grossières.
Cette Nature est revenue avec la
lumière; & elle a été produite avec la
lumière, qu'a enfanté une Nuée ténébreuse,
& cette Nuée est la Mère de
toute l'Oeuvre.
Mais lors que nous unirons le Roi
couronné à notre Fille rouge. Cette Fille,
par le moyen d'un régime de feu si
bien tempéré, qu'il ne puisse rien gâter,
concevra un Fils, qui sera uni à elle, &
qui sera pourtant au-dessus Elle nourrit
ce Fils, & le rend fixe & permanent,
avec ce petit feu. Et ainsi le Fils vit de
notre feu.
Or quand on laisse le feu sur la feuille
de Soufre, il faut que le terme des
coeurs entre sur lui, qu'il en soit lavé,
& qu'ainsi son ordure sorte hors de lui.
Il se change alors, & quand il est tiré du
@
CHAPITRE III. 35
feu, sa teinture demeure rouge comme
les chairs
vives.
Notre Fils, qui est né Roi, reçoit sa
teinture du feu; après quoi, & la mort,
& la mer, & les ténèbres le quittent;
parce qu'il devient vivant; il se dessèche,
& se fait poudre; & il a une lueur vive
& éclatante.
Le Dragon, qui garde les trous, fuit
les rayons du Soleil. Notre Fils, qui
est mort, reprendra la vie. Il sortira du
feu étant Roi, & il se réjouira de son
union & de son mariage. Ce qui était
occulte & caché deviendra manifeste &
apparent, & le lait de la Vierge sera
blanchi.
Ce Fils, ayant reçu la vie, combat
contre le feu, il a une teinture la plus
excellente de toutes les teintures. Car
alors il a le pouvoir de faire du bien,
en communiquant cette teinture à ses Frères.
Et il contient en soi la Philosophie,
puisqu'il en est le fruit & l'ouvrage.
Venez, Fils des Sages; réjouissons-
nous tous ensemble; faisons éclater notre
joie par des cris d'allégresse; car la
mort est consumée. Notre Fils règne. Il
a sa robe rouge, & il est revêtu & paré
de sa pourpre.
@
36 LES SEPT CHAPITRES.
----------------------------------------
C H A P I T R E IV.
E Coutez, Fils des Sages, comme
cette Pierre crie: Défendez-
moi, & je vous défendrai. (1) Voulez-vous
me donner ce qui m'appartient,
afin que je vous aide?
(1) Quoique la Nature | de ce premier Mercure avec
|
ne produise pas seulement | l'Or, qui est par où
|
la Matière du premier | commence cette dernière
|
Mercure des Philosophes | Opération. Et c'est là
|
& l'Or, qui sont, dit | cette jonction que la Pierre
|
Philalèthe, les matériaux | (c'est-à-dire ce Mercure,
|
du Magistère; mais qu'elle a | qui est la principale
|
en soit même la principale | partie de la Pierre) demande
|
Ouvrière; il est certain | ici à l'Artiste qu'il
|
néanmoins qu'elle ne le | fasse, afin qu'elle lui aide
|
saurait faire toute seule, | ensuite; la Pierre (ou cette
|
& il faut nécessairement | Matière) ne pouvant
|
que l'Art lui aide. Ce | être utile, si elle n'est
|
qu'il fait dans toute l'étendue | parfaite, ni parfaite sans
|
& la durée de l'Oeuvre. | cette union du Mercure
|
Car dans la première | & de l'Or au moins par la
|
Opération, l'Art | voie ordinaire, qui est ou
|
aide à la Nature à faire la | la seule que les premiers
|
Composition du premier | Philosophes ont sue, ou
|
Mercure, par la préparation | qu'ils ont voulu que l'on
|
qu'il donne à sa Matière, | sût. Et c'est assurément
|
& sans doute encore | celle dont parle notre Auteur,
|
par d'autres secours, qui | puisqu'il assure dans
|
pour être moins pénibles, | le Chapitre 7. que sans
|
ne sont pas moins nécessaires. | le Ferment de l'Or l'Elixir
|
Et dans la seconde, | ne se peut faire.
|
l'Art contribue à parachever | Or ce Philosophe fait dire
|
l'ouvrage, tant par le | ici au Mercure, que l'Or
|
régime du feu, qu'il entretient | lui appartient, parce que
|
& conduit, que | l'Or est le fils du Mercure,
|
par la jonction qu'il fait | étant fait de sa propre
|
@
CHAPITRE VI. 37
Mon Soleil & mes rayons sont intimement
en moi; & la Lune, qui m'est
Substance; & que d'ailleurs | cela, & ne déchoit nullement
|
c'est de l'Or seul, de | de la teinture ni
|
qui le Mercure attend sa | de sa fixité. Car la dissolution
|
fixité & sa teinture. Aussi | de l'Or, qu'on appelle
|
est-ce l'Or, comme il | autrement réincrudation,
|
est dit sur la fin de ce Chapitre, | n'est autre chose
|
qui retient la Substance | que la réduction qui se
|
de sa Mère, lorsqu'il | fait de l'Or en ses principes,
|
est uni à elle; c'est- | sans que ces principes
|
à-dire, qu'il fixe le Mercure, | soient détruits ni altérés,
|
au même temps que | & qu'ils ne perdent rien de
|
ce Mercure le dissout: car | leur première perfection,
|
par ce moyen, ils s'unissent | comme nous voyons que
|
ensemble pour n'être | dans la dissolution des autres
|
jamais séparés. Et c'est | Mixtes leurs principes
|
pareillement le Laiton ou | demeurent tous entiers.
|
l'Or, dit notre Auteur | Aussi les Philosophes assurent
|
ensuite, qui est la teinture | que la dissolution du
|
de l'Eau permanente, | Corps est la fixation de
|
c'est-à-dire du second | l'Esprit; c'est-à-dire qu'au
|
Mercure des Philosophes, | même temps que le Mercure,
|
qui est fixe, & duquel la | qui est l'Esprit, dissout
|
dissolution de l'Or fait | l'Or, que l'on nomme
|
une partie: ce second Mercure | Corps; l'Or fixe le Mercure.
|
étant composé de l'union | Ce qu'il ne fait que
|
du premier Mercure, | par le moyen de son Soufre,
|
qui est le Dissolvant de | parce que c'est le
|
l'Or; & du Mercure de | Soufre qui teint & qui fixe.
|
l'Or, ou de sa dissolution. | De sorte que le Soufre
|
Ce qui a été cause que le | de l'Or retient sa vertu
|
Trévisan appelle ce second | fixative, dans le temps même
|
Mercure des Philosophes | que l'Or est dissous,
|
le double Mercure. L'Or | puisqu'alors il fixe le
|
donne, dis-je, la teinture | Mercure, en s'unissant à
|
à ce Mercure, à cause | lui, & le rendant par ce
|
du Soufre très pur & parfaitement | moyen Eau permanente.
|
digéré, que l'Or | Et par conséquent il doit
|
a dans lui-même, & qui | aussi retenir sa teinture,
|
lui donne sa couleur & son | puisqu'après avoir fixé ce
|
éclat. Et quoique l'Or | Mercure, il le teint en lui
|
soit dissous, son Soufre ne | donnant la perfection d'Elixir,
|
perd rien néanmoins pour | avec le secours du
|
@
38 LES SEPT CHAPITRES.
propre & particulière, est ma lumière,
qui surpasse quelque lumière que ce soit;
& mes biens valent mieux que tous les
autres biens.
Je donne la joie, la satisfaction, la gloire,
les richesses, & les plaisirs solides
à ceux qui me connaissent; & je leur
donne encore la parfaite intelligence de
ce qu'ils cherchent,
avec tant d'empressement,
& je leur donne enfin la possession
des choses divines. (1)
Ecoutez, je vais vous découvrir ce
que les anciens Philosophes avaient celé
de leur Science. C'est une chose dont
le nom est compris en sept lettres. Car
elle en suit deux Alpha & Eta.
Le Soleil suit tout de même la Lune,
& il vient après elle; mais il veut pourtant
avoir la domination, & être le maître
feu extérieur, que l'Artiste | divines, c'est-à-dire à la
|
entretient continuellement; | connaissance de Dieu;
|
& sans lequel la | qu'en cette vue ils glorifient
|
Nature, c'est-à-dire les | comme Dieu, parce
|
Esprits & la chaleur, qui | qu'ils savent bien que
|
sont intimement dans la | d'eux-mêmes ils n'ont pas
|
Matière, ne saurait rien | été capables d'acquérir
|
faire. | une Science si admirable
|
(1) Il veut dire que la | & si extraordinaire; mais
|
Science, comme le dit Morien, | que cette capacité, comme
|
inspire aux Philosophes | parle l'Apôtre, leur a été
|
un grand détachement | donnée du Père des lumières,
|
& un grand mépris | qui est l'Auteur
|
du monde & de ses vanités; | & le juste Dispensateur de
|
& qu'elle les élève à la | tous les biens. M. Salom.
|
contemplation des choses |
|
@
CHAPITRE VI. 39
de l'Oeuvre, Il veut conserver Mars,
& teindre le Fils de l'Eau vive, qui est
Jupiter, & c'est là le Secret que les Philosophes
ont caché. (1)
Comprenez-moi donc, vous qui m'écoutez,
& dorénavant mettons en pratique
ce que nous savons. Je vous ai
déclaré ce que j'ai écrit, après l'avoir
recherché fort curieusement, & l'avoir
fort subtilement médité. C'est que je
connais une certaine chose qui est unique.
Car qui est-ce qui comprend notre
(1) Il est parlé ici des | parfaite? & Jupiter doit
|
Couleurs de l'Oeuvre, que | être teint tant en Lune
|
l'Auteur marque, comme | qu'en Soleil; parce qu'encore
|
font ordinairement les | que Jupiter précède
|
Philosophes, par le nom | la Lune, on peut dire
|
des Métaux, puisqu'il nomme | aussi en quelque façon qu'il
|
ici la Lune, le Soleil | la suit. Car la couleur
|
& Jupiter, & que Vénus | blanche parfaite de Lune,
|
est nommée ensuite. Que | qui est une augmentation
|
c'est de la Couleur rouge | de la Couleur de Jupiter
|
dont il s'agit principalement, | & qui le teint, ne peut
|
qui veut, dit-il, | passer à la Couleur rouge
|
avoir la domination, et | que par degrés, & en diminuant
|
que la Couleur de Mars, | peu à peu: de
|
qui est appelée, rouille | manière que cette diminution,
|
dans la Tourbe, & le rouge | qui suit la blancheur
|
diminué, est une ébauche | parfaite, peut être appelée
|
& un commencement de la | Jupiter aussi bien que
|
Couleur rouge. De manière | la diminution qui la précède.
|
que lorsque la Couleur | Et c'est proprement
|
de Mars commence à paraître | cette dernière diminution
|
dans l'Oeuvre, la | de la blancheur, qui reçoit
|
Matière ne la quitte plus; | les premières impressions
|
mais cette Couleur se fortifie | de la Couleur rouge;
|
& s'augmente toujours | & par conséquent Jupiter
|
en elle par la cuisson, | est teint de la rougeur solaire.
|
jusqu'à ce qu'elle | M. Salomon.
|
soit arrivée à la rougeur |
|
@
40 LES SEPT CHAPITRES.
Science, ceux qui l'étudient sérieusement,
la recherchant avec une si grande
application, qu'ils emploient toute
la force de leur esprit & de leur raisonnement
pour la découvrir?
Voyez comme (1) d'un Homme il
ne peut provenir que son semblable, et
d'un autre Animal non plus. Et s'il arrive
que deux Animaux de différentes espèces
s'accouplent, il en naîtra un, qui
ne ressemblera ni a l'un ni a l'autre.
Maintenant Vénus dit: J'engendre la
lumière, & les ténèbres ne sont pas de
ma nature: & n'était que mon Métal
est sec, tous les
autres Corps auraient
besoin de moi.
Car je les fonds, j'efface leur rouille
& je tire leur substance. Rien n'est donc
meilleur, ni ne mérite d'être plus honoré
que mon Frère & moi lorsque
nous sommes unis.
Mais le Roi, qui a la domination de
l'Oeuvre, dit à ses Frères, qui
par leur
transmutation, rendent témoignage
de
cette vérité. Je suis couronné, je suis
(1) Les Philosophes se | blable, le même aussi se
|
servent souvent de cette | doit nécessairement faire
|
comparaison, qu'ils prennent | dans les Minéraux; &
|
tant des Animaux que | qu'ainsi leur Oeuvre ne
|
des Végétaux, pour nous | peut être faite d'une Matière
|
faire voir évidemment que | étrangère, & qui ne
|
comme dans ces deux familles | soit pas de même espèce,
|
de la Nature, chaque | & de même nature qu'elle.
|
chose produit son sem- | M. Salomon. paré
|
@
CHAPITRE VI. 41
paré du Diadème, (1) je porte le manteau
royal, & je remplis les coeurs de joie.
Et quand je me trouve entre les bras
& sur le giron de ma Mère, & que je suis
uni à sa substance, je retiens & j'arrête
cette substance en la fixant (2) Et de
ce qui est visible, j'en fais & j'en compose
l'invisible.
Alors ce qui est occulte et caché,
sera manifesté & apparaîtra; & tout ce
que les Philosophes ont celé
de leur Oeuvre,
sera
évidemment produit & engendré
de nous deux.
(1) Les Métaux imparfaits, | me la Tourbe, de même
|
qui sont les Frères | sang que lui: car autrement
|
de ce Roi, étant formés | ces deux Mercures
|
de la même matière que | ne s'uniraient pas inséparablement,
|
lui, rendent témoignage | comme ils
|
de sa Royauté, lorsque | font. Et de ce qui est visible
|
par leur transmutation, il | j'en fais & j'en compose
|
les y associe, & leur fait | l'invisible. Il semble
|
part de son Diadème & de | qu'il faudrait dire tout
|
sa Pourpre Royale. | le contraire, & qu'il y
|
(2) L'Or fixe la substance | eût, de l'invisible j'en
|
de sa Mère, c'est-à-dire | fais le visible, parce qu'il
|
du Mercure, qui est naturellement | est dit ensuite que ce qui
|
volatil. Il est | est occulte devient manifeste.
|
vrai que l'on peut dire que | Mais le visible qui
|
l'Or, ou du moins son soufre, | devient invisible, se doit
|
fixe aussi sa Substance, | entendre, à mon sens, de
|
tant parce qu'il fixe pareillement | la couleur de l'Or, qui
|
son Mercure, je | se perd en sa dissolution,
|
veux dire, le Mercure en | & qui est comme ensevelie
|
quoi il est résolu; qu'à | dans la noirceur, mais qui
|
cause que le Mercure qui | se dégage & qui paraît
|
le dissout, est de même | dans la suite de l'Opération.
|
nature & de même substance, | M. Salomon.
|
ou pour parler com- |
|
{{Tom. I}. D
@
42 LES SEPT CHAPITRES.
Comprenez bien ces paroles, vous
qui m'écoutez; conservez soigneusement
dans votre coeur; méditez-les
attentivement, & ne cherchez rien autre
chose.
Ne voyez-vous pas que l'Homme,
dont les entrailles sont de chair, est engendré
du principe de Nature,
lequel
est fait de sang, dont la chair a été faite
elle-même. Et l'Homme ne saurait avoir
été fait autrement,
ni formé d'autre
chose. Méditez ce que je viens de dire,
& rejetez tout ce qui est superflu,
& étranger. (1)
C'est pourquoi le Philosophe a dit,
(2) Botri est fait de l'Orangé, qui est
(1) L'exemple que notre | impuretés qu'il a contractées
|
Auteur prend ici de la | dans sa Matrice) en
|
conformation du corps de | se servant de toute une autre
|
l'Homme, qui n'est, ni | Matière, que de celle
|
ne peut être fait que des | dont sont formés les Métaux,
|
principes qui sont de sa | tant ceux qui doivent
|
même nature, confirme | recevoir cette perfection,
|
ce qu'il a dit dans le | que ceux qui ont
|
Chap. 1. que l'Oeuvre est | une perfection semblable à
|
dans nous & chez nous: | celle qu'ils doivent recevoir.
|
& fait voir l'aveuglement | Et cette Matière différente
|
de ceux qui prétendent | & étrangère est
|
faire le Magistère des Philosophes, | appelée ici le superflu,
|
qui doit donner | que l'Auteur commande de
|
la Perfection aux Métaux | rejeter, ou de ne s'en
|
imparfaits (c'est-à- | point servir, comme étant
|
dire, donner à leur Mercure | une chose superflue, & entièrement
|
la fixité & la teinture | inutile à l'Oeuvre.
|
de l'Or & de l'Argent, & | M. Salomon.
|
le dégager du mauvais | (2) Il est difficile de dire
|
soufre & des crases & | ce que les Philosophes
|
@
CHAPITRE VI. 43
tiré du noeud rouge, & non d'ailleurs.
Que si vous le pouvez faire orangé, ce
sera un effet de votre sagesse, & un témoignage
de la certitude de votre Science.
Ne vous souciez & ne vous appliquez
uniquement qu'à tirer & à faire sortir
du rouge
cette couleur orangée. Voyez,
je ne me suis point servi d'un circuit de
paroles, & si vous m'entendez, vous
verrez que peu s'en faut que je ne l'aie
découvert.
Fils des sages, (3) brûlez le corps
entendent par ce mot Botri, | que Botri est fait de l'orangé,
|
les Arabes ne le connaissant | & que cet orangé
|
pas, & n'étant ni | est fait du rouge, c'est-
|
Grec, ni Latin. Il est vrai | à-dire que l'Or, lequel par
|
qu'il s'approche du Grec, | sa dissolution, perd sa couleur
|
car Botris en cette Langue | rouge & qui ayant
|
signifie un raisin; & une | passé par plusieurs couleurs,
|
sorte d'herbe dans Dioscoride | devient orangé,
|
& dans Pline. Mais | avant que d'arriver à la
|
quoique les Philosophes | rougeur parfaite. C'est
|
parlent de vigne & de vin, | pourquoi il est dit dans la
|
je ne me souviens point | suite que l'on doit s'appliquer
|
d'avoir lu le mot de raisin | uniquement à
|
dans leurs Livres, ni | faire en sorte que le rouge
|
qu'ils s'en soient servis | devienne orangé, parce
|
pour signifier ni l'Oeuvre, | que ce sera une marque infaillible
|
ni quelqu'une de ses circonstances. | que l'Or a été dissous,
|
Joli a expliqué | ce qu'il n'y a que les
|
ce mot Botri par celui | Philosophes qui puissent
|
du Soufre, ce que sans | faire. M. Salomon.
|
doute il n'a pas dit de | (3) Les Philosophes,
|
lui-même. Il y a même | par ce mot Laiton, entendent
|
apparence qu'en cet endroit | le plus souvent
|
il signifie le Soufre | l'Or; quoiqu'ils le prenne
|
parfait, parce qu'il est dit | aussi quelquefois pour
|
| D ij
|
@
44 LES SEPT CHAPITRES.
du Laiton à fort feu, & il vous donnera
ce que vous cherchez. Empêchez
que celui qui fuit, ne s'envole de celui
qui ne fuit pas,
& qu'il ne le quitte &
ne se sépare de lui.
Mais faites en sorte qu'il se repose, &
qu'il demeure sur le feu, quelque âpre
qu'il soit. Et ce qui sera corrompu par
la chaleur violente du feu, c'est Cambar.
(1)
Sachez que le Laiton est une partie
de cette Eau permanente, qu'il est sa
teinture, & que ce qui lui a fait sa noirceur,
sa dissolution. L'Auteur | cher que celui qui fuit,
|
dit ici, qu'il le faut brûler | ne s'envole & ne s'enfuie
|
à fort feu, c'est-à- | pas de celui qui ne
|
dire, le dissoudre par le | fuit point. Il veut dire,
|
Mercure des Philosophes; | qu'il faut faire le feu si
|
parce que la Tourbe Latine | doux, au commencement
|
assure, comme il a déjà | de la Seconde Opération,
|
été dit, que l'Argent-vif | que le Mercure, qui est volatil,
|
est de la nature du feu, | ne s'élève pas tout
|
& qu'il brûle les Corps | seul, sans enlever peu à
|
ou Métaux, mieux que | peu l'Or avec lui. Parce
|
ne fait le feu. Mais le | que si le Mercure se sublimait
|
Laiton, ou l'Or, de son | tout seul, il laisserait
|
côté retient & fixe le | le Corps, qui est le
|
Mercure, qui est naturellement | Laiton ou l'Or, au fond
|
volatil, & qui | du vaisseau, sans qu'il fût
|
s'enfuit de dessus le feu. | nullement altéré: & ainsi
|
Et afin que la dissolution du | la dissolution ne se ferait
|
Laiton se puisse faire par | point, ni l'Oeuvre par
|
le Mercure, notre Auteur | conséquent. M. Salomon.
|
donne ici une règle | (1) C'est Cambar. ce
|
pour le régime & la conduite | mot est encore l'un de ceux
|
du feu, que l'on doit | dont les Philosophes se
|
exactement observer, lors | servent, & que l'on peut
|
de cette opération: qui | dire qui n'est que de leur
|
est, qu'il faut empê- | Langue & de leur Idiome.
|
@
CHAPITRE VI. 45
se change alors en véritable rouge.
(1)
Je proteste devant Dieu que je n'ai
dit que la vérité. Et que les choses qui
détruisent, sont celles-là même qui perfectionnent.
(2) Et c'est pour cela que
rien ne peut être amendé ni rendu meilleur,
s'il n'est corrompu auparavant, &
cette corruption fera paraître l'amendement
& la perfection; & l'un & l'autre
est une marque essentielle de la vérité de
l'Art.
Flamel en parle dans son | te la perfection de l'Elixir,
|
Chap. 5. selon notre Edition. | ce sont le premier Mercure
|
Et il dit que c'est un | des Philosophes, &
|
des noms que les Philosophes | le feu extérieur. Car ce
|
envieux ont donné à | sont ces deux Agents qui
|
l'Opération qu'il décrit en | font la dissolution de l'Or,
|
cet endroit-là. Joli a traduit | & qui vivifient & digèrent
|
Cambar, par Mercure. | cette dissolution. De sorte
|
Mais je ne sais quelle | que l'Or ne pouvant teindre
|
autorité il a eue pour | s'il n'est teint, c'est-à-
|
cela. M. Salomon. | dire s'il n'est élevé à une
|
(1) Le Laiton ou l'Or, | plus forte couleur, que
|
étant dissous & uni avec | celle que la Nature lui a
|
son Dissolvant, compose | donnée; & ne pouvant
|
le double Mercure, comme | recevoir cette teinture,
|
le Trévisan l'appelle, | s'il n'est détruit & dissous,
|
& que notre Auteur nomme | & s'il ne reçoit un nouveau
|
Eau permanente, | Soufre par le premier
|
parce que ce Mercure est | Mercure, & que le sien
|
fixe & permanent; ainsi | ne soit plus cuit & plus
|
le Laiton est véritablement | digéré par la cuisson, il
|
une partie de cette | est évident que sa corruption
|
Eau, qui est le second | est la cause de sa perfection,
|
Mercure des Philosophes. | & que ce qui le
|
(2) Ces choses qui détruisent | détruit, est ce qui le perfectionne.
|
l'Or ou le Laiton, | M. Salomon.
|
& qui lui donnent ensui- |
|
@
46 LES SEPT CHAPITRES.
----------------------------------------
C H A P I T R E V.
M On Fils, ce qui naît du Corbeau
est le commencement de cet
Art. Voici, j'ai obscurci ce que je vous
ai dit, & je lui ai ôté sa clarté (1) par
un circuit de paroles; & j'ai dit,
que ce qui est conjoint était désuni, &
que ce qui est très proche, était fort
éloigné.
Rôtissez donc ces Matières; & cuisez-les
ensuite par l'espace de sept jours,
de quatorze & de vingt & un, (2) dans
ce qui vient du ventre des Chevaux.
Lors se fait le Dragon, qui mange
ses ailes, (3) & qui se mortifie soi-même.
(1) Cette circonlocution, | tête du Corbeau. M. Salom.
|
par laquelle il a obscurci ce | (2) On se sert souvent
|
qu'il voulait dire, est à | dans la Chimie vulgaire
|
mon avis, qu'au lieu de | du fumier de Cheval, pour
|
dire, que le Corbeau est | mettre les Matières en digestion.
|
le commencement de | Les Artistes l'appellent
|
l'Oeuvre, il a dit, que | ordinairement le
|
c'était ce qui naît du Corbeau, | ventre de Cheval, &
|
c'est-à-dire, la noirceur. | le Vicaire du Bain-Marie.
|
Car en disant ce qui | Notre Auteur veut
|
naît du Corbeau il dit deux | dire ici, que la chaleur
|
chose, le Corbeau, & ce qui | doit être douce au commencement
|
naît de lui; & cependant il | semblable à
|
n'y a qu'une seule chose, | celle du fumier de Cheval
|
par où commence l'Oeuvre, | échauffé. M. Salomon.
|
qui est la noirceur, | (3) Les Philosophes
|
que les Philosophes appellent | appellent leur premier
|
le Corbeau, où la | Mercure un Dragon volant,
|
@
CHAPITRE VI. 47
Après quoi mettez-le dans un morceau
de drap, & dans le feu du fourneau,
& prenez soigneusement garde
qu'il ne sorte du vaisseau. (4)
non seulement à raison | faudrait lire, in bociâ
|
de la Matière d'où il | stanni; ce qui voudrait
|
est tiré, qui est, disent- | dire, qu'alors il faudrait
|
ils, un poison; mais encore, | mettre la Matière de
|
parce qu'il est volatil, | l'Oeuvre dans un bocal ou
|
& qu'il ronge & dissout | vaisseau d'Etain, par une
|
l'Or, qu'il enlève | façon de parler, qui est
|
peu à peu, en se sublimant | assez ordinaire aux Philosophes,
|
par une chaleur douce. | pour marquer que
|
Mais lorsque la dissolution | le Régime de Jupiter doit
|
de l'Or est faite, & | commencer immédiatement
|
que la Matière est noire, | après celui se Saturne;
|
le Mercure ne s'élevant | c'est-à-dire que de la
|
plus, à cause que cet Esprit | noirceur, la Matière
|
est devenu fixe par la | doit passer à la blancheur,
|
dissolution du Corps, qui | telle qu'est celle de Jupiter;
|
lui a communiqué sa fixité, | qu'autrement l'Oeuvre
|
le Dragon mange alors | ne se fera point: le mot
|
ses ailes & se mortifie; | Bocia étant usité par ceux,
|
c'est-à-dire devient | qui ont traduit les Livres
|
noir, ce qui marque la | des Arabes en Latin,
|
mortification de la Matière. | qu'ils ont peut-être pris du
|
M. Salomon. | mot Espagnol Bocal dont
|
(4) Je n'entends point ce | nous nous servons aussi.
|
que l'Auteur veut dire par | L'Auteur ajoute qu'alors
|
petiâ panni, c'est-à-dire | on doit mettre la Matière
|
une pièce ou un morceau | dans le feu du fourneau;
|
de drap. Car quel sens peut | voulant dire, que comme
|
avoir ici le mot de drap | la Matière est fixe, puisque
|
même par figure, où il ne | c'est alors le double
|
s'agit que de cuire les | Mercure & l'Eau permanente;
|
deux Matières, ou Mercures, | on doit augmenter
|
exactement mêlées | le feu, afin que la cuisson
|
ensemble par la corruption, | s'en fasse mieux; n'y ayant
|
ou la fermentation | plus à craindre que le premier
|
qui s'en est faite, comme | Mercure s'élève, &
|
le marque la noirceur qui | qu'il se sépare de l'Or, qui
|
a précédé? Peut-être qu'au | est dissous, & avec lequel
|
lieu de in petiâ panni, il | il est uni. M Salomon.
|
@
48 LES SEPT CHAPITRES.
Et sachez que les temps de la Terre
sont dans l'Eau, & que l'Eau se fait
toujours, jusqu'à ce que vous mettiez
la Terre sur elle. (1)
Quand la Terre sera donc réduite en
Eau, & brûlée, prenez son Cerveau, &
broyez-le par le Vinaigre très fort, &
l'Urine d'Enfants, jusques à ce qu'il s'obscurcisse.
(2)
(1) Il veut dire, à mon | que la noirceur est dissipée,
|
avis, que la Terre ne paraît | que la Matière a blanchi:
|
point dans l'Oeuvre, | Et c'est de-là en partie,
|
que par le dessèchement | que quelques Auteurs
|
de l'Eau; de manière | ont pris sujet de dire, que
|
que la conversion des | l'Oeuvre ressemble à la
|
Eléments dépend de la | Création du Monde, où
|
coagulation & de la cuisson | tout était eau & ténèbres
|
du Mercure, qui est | au commencement, jusqu'à
|
l'Eau des Philosophes, | ce que Dieu, ayant
|
laquelle devient Terre, | produit la Lumière, la
|
en se desséchant par la | Terre parut peu après
|
digestion qui s'en fait. | toute sèche. M. Salomon.
|
L'Eau se fait donc toujours, | (2) Le Cerveau de la
|
comme il est dit | Terre, est, à mon sens,
|
ensuite, jusques à ce que la | l'Or qui a été sublimé &
|
Terre soit mise sur elle. | élevé au haut du Vaisseau,
|
C'est-à-dire, que dans | par le premier Mercure,
|
l'Oeuvre, il ne paraît que | Et c'est ce que l'auteur
|
de l'Eau, au commencement | dit qu'il faut broyer, ou
|
& dans la suite de | mettre en poudre par le
|
l'Ouvrage, lorsque le | Vinaigre très fort, il veut
|
premier Mercure, qui est | dire par le même Mercure,
|
liquide, dissout l'Or & | que la Tourbe appelle
|
le réduit en Mercure ou | Vinaigre très aigre, &
|
en Eau, jusqu'à ce que | l'Urine des Enfants, à cause
|
cette Eau devienne fixe & | de son acrimonie & ponticité.
|
permanente; par l'action | Ainsi, par une manière
|
du Soufre, & qu'elle s'épaississe | de parler des Philosophes,
|
par la cuisson, & | l'Auteur dit ici,
|
que la Terre apparaisse: | que lorsque la Terre est
|
Ce qui n'arrive qu'après | réduite en eau (il veut
|
| Cela
|
@
CHAPITRE V. 49
Cela étant fait, votre Magistère vit dans
la pourriture, les nuées noires qui étaient
en lui avant qu'il mourût, seront changées
& converties en son Corps. Or étant refait
de la manière que je l'ai décrit, il meurt
une seconde fois, & après il reçoit la vie,
ainsi que je l'ai dit. (1)
Au reste, nous nous servons d'Esprits,
& dans sa vie, & dans sa mort. Car de
même qu'il meurt lorsque ses Esprits lui
sont ôtez, il se revivifie aussi lorsqu'ils lui
sont rendus, & il s'en réjouit.
Si vous pouvez parvenir jusque-là [2]
dire, quand l'Or est dissous] | sant cuire & digérer de la
|
il faut faire ce qui | manière que la Pierre a été
|
est déjà fait. Ou, par le | faite du premier Mercure
|
cerveau de l'Oeuvre, il | & de l'Or. M. Salon.
|
entend l'Elixir, qui se | [1] Il parle ici de la
|
fait par la dissolution ou | Multiplication, qui est
|
liquéfaction du Corps ou | une réitération abrégée de
|
de l'Or, & par la combustion | l'Oeuvre, dans laquelle
|
de l'Esprit, c'est-à- | la Matière [qui est composée
|
dire par la conversion du | du premier Mercure
|
second Mercure en terre | des Philosophes & de l'Elixir]
|
ou en poudre: parce que | reçoit les mêmes
|
comme le cerveau est la | changements & les mêmes
|
principale partie du corps | couleurs qu'à la première
|
de l'Homme, où l'Ame | fois, n'y ayant d'ailleurs
|
exerce ses plus nobles fonctions, | nulle autre différence entre
|
aussi l'Elixir est | ces deux Opérations,
|
l'Ame, & la Quintessence | que de l'espace du temps,
|
de l'Oeuvre. Ainsi | qui est plus court dans la seconde
|
l'Auteur enseignerait ici | que dans la première,
|
la manière de faire la multiplication, | qui diminue à mesure qu'on
|
[comme en effet | refait la Multiplication.
|
il en parle ensuite] en | M. Salomon.
|
dissolvant l'Elixir dans le | [2] L'auteur veut
|
premier Mercure, & le fai- | dire ici, que si l'Artiste
|
{{Tome I}. * E
@
50 LES SEPT CHAPITRES.
je vous assure que vous aurez la satisfaction
de voir ce que vous cherchez. Je
vous dis ici les signes qui réjouissent ceux
qui les voient, & ce qui fixe son Corps.
Or quoi que vos Prédécesseurs soient
arrivés par cette Opération à ce qu'ils s'étaient
proposé de faire, ils sont pourtant
morts [1]
peut faire par son Opération, | ment. M. Salomon.
|
que l'Esprit vivifie | [1] L'Auteur veut peut-
|
le Corps, il verra | être dire, qu'encore que
|
ce qu'il souhaite, & qu'il | les Philosophes aient su
|
fera indubitablement le | le secret d'animer & de
|
Magistère: car les Philosophes | vivifier une Matière morte,
|
nous assurent que | comme l'est l'une de
|
toute la difficulté & tout | celles qu'ils emploient à
|
le secret de l'Oeuvre consiste | faire leur grand' Oeuvre,
|
à dissoudre & à rendre | ils n'ont pas pu s'empêcher
|
volatil le Corps | de mourir, & n'ont
|
qui est fixe, & à fixer | pu se revivifier eux-mêmes
|
l'Esprit qui est volatil: | n'y ayant que Dieu,
|
à mortifier, ou à faire | seul qui puisse le faire. Et
|
mourir le vif, & à vivifier | ainsi quoique l'Elixir ait
|
le mort. Car qui pourra | la vertu d'entretenir la
|
faire ces Opérations, | santé, de garantir des maladies,
|
il saura faire le premier | & de les guérir,
|
Mercure des Philosophes | il ne peut pas immortaliser
|
qui est le seul & véritable | l'Homme pour cela;
|
Dissolvant de l'Or, & | puisque, comme le dit
|
ce qui le rend volatil & | l'Apôtre, c'est une loi &
|
qui le vivifie. Et ainsi il | une nécessité à l'Homme
|
saura tout ce qu'il y a de | de mourir une fois.
|
caché & de mystérieux | J'aurais occasion de parler
|
dans l'Oeuvre, n'y ayant | ici de l'immortalité que
|
que le seul premier Mercure, | quelques-uns ont attribuée
|
que les Philosophes | aux Rose-croix, qui fixent,
|
aient celé; c'est-à-dire | disent-ils, leurs Ames dans
|
dont ils n'ont pas parlé si | leurs corps par le moyen
|
ouvertement que du reste, | de l'Elixir. Mais outre que
|
quoi qu'ils l'aient peut- | ceux qui ont écrit de cette
|
être dit aussi intelligible- | Confrérie, [véritable ou
|
@
CHAPITRE VI. 51
Je vous ai déjà montré l'accomplissement
ou la fin
de l'Oeuvre; j'ai ouvert le
Livre à ceux qui savent; j'ai celé
aux
autres les choses qui leur sont cachées, &
inconnues; j'ai joint & incorporé ensemble
celles qui étaient séparées, & qui avaient
des figures différentes, & j'ai uni les
Esprits. Recevez ce Don des mains de
Dieu. [1]
imaginaire] rapportent la | gence de l'Oeuvre. Ainsi
|
mort des premiers de cette | ils ont écrit pour confirmer
|
Société, le lieu de leur | ceux qui savent, &
|
Sépulture, & leurs Epitaphes, | non pour instruire ceux
|
il faudrait faire | qui ne savent rien. L'Auteur
|
un trop long discours, qui | fait ensuite une récapitulation
|
ne servirait de rien; ceux | de tout le Magistère
|
qui aurons cette curiosité | en peu de mots. En
|
pouvant voir ce que Mayerus, | disant, Qu'il a joint les
|
Flud, & quelques | choses qui étaient séparées,
|
autres en ont écrit. M. Sal. | il entend les deux
|
[1] Les Philosophes assurent | Matières, qui ont des figures
|
tous qu'ils n'ont | différentes; c'est-
|
écrit que pour les Enfants | à-dire, dont l'une est liquide,
|
de la Science. ils appellent | & l'autre solide:
|
ainsi ceux qui ont | & qu'il a uni les Esprits,
|
quelque connaissance de | appelant Esprit le Corps
|
la manière de faire & de | qui a été spiritualisé par
|
composer leur premier | la Sublimation, comme
|
Mercure, parce que c'est | l'Esprit a été pareillement
|
la clef & toute l'intelli- | corporisé. M. Salomon.
|
----------------------------------------
C H A P I T R E VI.
N Ous sommes obligés de rendre grâces
à Dieu, qui donne à tous ceux
qui sont sages une Science si admirable,
E ij
@
52 LES SEPT CHAPITRES.
qu'elle nous délivre de la misère & de la
pauvreté; & de ce qu'il a renfermé tant de
merveilles dans la Pierre des Sages. [1]
Quoi que ceux à qui il ne fait pas une
grâce si singulière n'aient pas moins de sujet
de le remercier de toutes les choses
qu'il produit continuellement pour leur
subsistance, & qui sont comme autant de
miracles qu'il fait incessamment pour tous
les Hommes.
Que si non contents de tous ses bienfaits,
ils aspirent à cette Science, ils doivent
demander cette grâce à Dieu par de
continuelles & ferventes prières, pour en
obtenir la connaissance pendant leur vie,
Au reste, afin que ce que j'ai dit ci-devant
des Onguents que nous tirons des
Ongles, des Poils, du Verdet, du Tragacant
& des Os,
ne les jette dans l'erreur,
je les avertis que ce sont des mots dont les
Anciens Philosophes se sont servis figurativement
dans leurs Livres, que l'on ne
doit pas prendre à la lettre.
Il nous reste encore à expliquer plus
amplement la disposition ou préparation de
[1] Ce Chapitre est tout | liaison avec ce qui précède,
|
tronqué, & presque corrompu | ni avec ce qui suit.
|
partout. Ainsi il | J'ai été même obligé de
|
est bien difficile de donner | laisser des lacunes en deux
|
un sens raisonnable à ce | endroits, où il est évident
|
qui nous en reste, la plus | qu'il manque quelque chose.
|
grande partie consistant en | M. Salomon.
|
des mots, qui n'ont nulle |
|
@
CHAPITRE VI. 53
l'Onguent, qui contient en soi les Teintures,
qui coagule & fixe les choses Volatiles
& qui embellit les Soufres. * * * * * *
* * * * * * * * * * * * * * * *
C'est un Onguent caché & enseveli, duquel
il semble qu'il n'y ait aucune préparation
à faire. Et il demeure dans son
Corps, comme le feu dans les Arbres, &
dans les Pierres. Et il faut tirer cet Onguent
par une industrie très subtile, &
par un grand artifice, & prendre garde
qu'il ne soit brûlé. * * * * * * * *
Et Sachez que le Ciel est joint à la Terre
par ce qui est médiocre; [1] parce que
[1] J'aurais occasion de | sens, que c'est l'Eau [qu'il
|
parler ici des figures qu'ont | appelle le médiocre, c'est-
|
les atomes ou petits corps | à-dire le moyen unissant,
|
qui sont les principes dont | comme parlent les Chimistes]
|
les corps sont composés & | qui joint & unit
|
qui ne s'unissent que par le | l'Esprit ou le Mercure,
|
moyen de ces figures; ceux, | avec le Corps ou l'Or,
|
dont les figures sont semblables, | par la dissolution qu'il en
|
s'unissant plus facilement, | fait. Car par ce moyen
|
& faisant la composition | le Corps est réduit en son
|
des Corps plus resserrée | Mercure, qui est liquide &
|
& plus forte, au lieu | coulant, & de nature d'Eau,
|
que ceux qui ont des figures | n'y ayant que les choses liquides
|
différentes, la font plus | qui puissent s'unir
|
poreuse, plus lâche, & | inséparablement, & n'être
|
moins pressée. Mais comme | plus qu'une même Substance.
|
il y a apparence que cet | Or il appelle le
|
endroit est corrompu, je | premier Mercure des Philosophes,
|
me contenterai d'expliquer | Ciel, parce qu'étant
|
l'intention de l'Auteur autant | fort spirituel, il s'élève
|
que je la puis connaître. | par la chaleur au haut
|
Il veut donc dire, à mon | du vaisseau. Et c'est ainsi
|
E iij
@
54 LES SEPT CHAPITRES.
l'Eau, qui est le médiocre, a une figure
commune
avec le Ciel & la Terre.
L'Eau est la première chose qui sort de
cette Pierre; l'Or est la seconde; la troisième
qu'il l'a ci-devant appelé | la Femelle, par un emportement
|
dans le Chapitre, où | d'amour, fait
|
il a dit, qu'il y a des Soufres | de la fonction Mâle, &
|
célestes & terrestres, | prend le dessus. Je veux
|
voulant dire, qu'il y a des | dire, que c'est le premier
|
Soufres dans le premier | Mercure, qui, s'élevant
|
Mercure, comme il y en | dans le Vaisseau, emporte
|
a un dans l'Or. Et il y a | l'Or qui est en bas, qui
|
ajouté en ce lieu-là, que | le dissout, qui l'engrosse,
|
le Mâle est le Ciel de la | & l'anime. Ce qui me fait
|
Femelle, & la Femelle la | croire, que dans le Chapitre
|
Terre du Mâle, parce | 2, que je viens de
|
que dans la génération ordinaire | citer, il faudrait qu'il y
|
des Animaux, d'où | eût, la Femelle est le Ciel
|
il prend cette comparaison, | du Mâle & le Mâle est
|
le Mâle tient toujours | la Terre de la Femelle,
|
le dessus, comme le Ciel | parce qu'ordinairement,
|
ou l'Air est au-dessus de | les Philosophes appellent
|
la Terre, & la Femelle | l'Or, Terre, & Corps; &
|
est au-dessous, de même | le Mercure, Eau, & Esprit.
|
que la Terre est à l'égard | Je dis ordinairement,
|
du Ciel ou de l'Air. De | car quelquefois ils appellent
|
sorte que c'est le Mâle qui | leur premier Mercure,
|
rend la Femelle féconde: | Terre, comme Philalèthe,
|
comme c'est par la vertu | dans le Chapitre
|
que la Terre reçoit du | XI. dit que les anciens
|
Ciel, c'est-à-dire, par la | Philosophes jugèrent que
|
chaleur du Soleil, & par | le Mercure était la Terre
|
les pluies qui s'élèvent & | dans laquelle ils devaient
|
qui se forment dans l'Air, | semer leur Or, afin qu'il
|
qu'elle devient fertile, | s'y vivifiât. Notre Auteur
|
& qu'elle fait toutes ses | suit ici la manière ordinaire,
|
productions. Néanmoins, | en appelant l'Or, Terre,
|
comme le dit M. d'Espagnet | parce qu'il est fixe,
|
dans son Traité, qui | solide & pesant, & que
|
a pour titre, Arcanum | naturellement il se tient
|
Hermeticum Philosophiae Opus, | en bas. Et par le médiocre,
|
cet ordre est renversé | il entend l'Eau,
|
dans l'Oeuvre des | comme il l'explique lui-
|
Philosophes, parce que | même, parce que l'Eau
|
@
CHAPITRE VI. 55
c'est une chose qui est presque Or,
& médiocre, qui est pourtant plus noble
que l'Eau, & que les fèces ou impuretés.
La fumée, la noirceur, & la mort se
trouvent en ces trois choses. Il faut donc
est sur la Terre, & qu'elle | l'Eau. Il dit ensuite que
|
est placée entre la Terre | l'Or est la seconde chose
|
& l'Air, que l'on appelle | qui en sort, parce que les
|
Ciel. Ou plutôt par | Philosophes appellent proprement
|
le médiocre, il entend | l'Or vulgaire leur
|
le second Mercure des Philosophes, | Or, lorsqu'il est animé,
|
qui est une Eau | dit Philalèthe; qui est
|
permanente, & qui tient | lorsque l'Or est entièrement
|
le milieu entre l'Or, | dissous, & uni au
|
qui est solide, & le Mercure | premier Mercure, & c'est
|
qui est une Eau vaporeuse | ce que notre Auteur dit
|
& volatile parce que | dans le Chapitre 7. qui est
|
ce second Mercure est une | plus pesant que le Plomb.
|
Eau fixe, moins solide que | Pour la troisième chose
|
l'Or, qui est la Terre; mais | qui sort de la Pierre &
|
plus épaisse que le premier | qu'il appelle le médiocre.
|
Mercure, qui est le | J'ai déjà dit que c'était le
|
Ciel, & qu'elle unit ensemble, | second Mercure des Philosophes:
|
puisqu'elle les | mais ce n'est que
|
contient tous deux, étant | lorsqu'il commence à sortir
|
faite du mélange & de | de la noirceur. Parce
|
l'union de tous les deux. | qu'en cet état il est encore
|
L'Auteur ajoute à ceci | un peu liquide, mais
|
que l'Eau est ce qui sort | pourtant plus noble que
|
le premier de la Pierre, | l'Eau, c'est-à-dire plus
|
c'est-à-dire de l'Or, qui | que le premier Mercure,
|
en est une des Matières; | puisque ce premier Mercure
|
parce que sa première Opération, | est lui-même une partie
|
qui se fait dans | de cette Eau qui est
|
le Vaisseau, après que le | faite de lui & de la dissolution
|
mélange des deux Matières | de l'Or. Et elle est
|
y est enfermé, c'est la | plus noble que les fèces;
|
réduction de cette Composition | c'est-à-dire, qu'en cet état
|
en Eau. Ce qui a | la Matière s'approche
|
fait dire à un Philosophe | plus de la perfection, que
|
qu'au commencement de | lorsque la dissolution se
|
l'Oeuvre il n'y a qu'Eau, | faisait, & que tout était
|
& qu'il ne se voit que de | noir. De sorte que cette
|
| E iiij
|
@
56 LES SEPT CHAPITRES.
que nous ôtions la fumée qui est sur l'Eau;
[2] que nous séparions la noirceur d'avec
l'Onguent, & que nous chassions la mort
hors des fèces. Ce que nous ferons par le
moyen de la Dissolution. Et par là nous
aurons une souveraine Philosophie, & le
Secret de tous les Secrets.
J'ai laissé dans ce Chapitre deux Lacunes
marquées par plusieurs étoiles, à cause
qu'il manque quelque chose en ces deux
endroits; & que la Traduction de Joli est
plus ample. Comme elle est même différente
au commencement, j'ajoute ici ce Chapitre
tout entier comme il l'a traduit. Le
voici, où l'on remarquera que ce qui est en
lettre différente, est ce qui n'est pas dans
les Exemplaires Latins, ni par conséquent
dans la Traduction que j'en ai faite.
Eau est presque Or, y | perfection, M. Salomon.
|
ayant peu à dire qu'elle | [2] Il veut dire, qu'il
|
ne soit Elixir, tous les | faut empêcher que le Mercure
|
changements intérieurs étant | ne s'élève en vapeur,
|
presque faits, & n'y | ce qu'il appelle la fumée,
|
ayant plus autre chose à | & qu'ainsi il faut lui ôter
|
faire pour la perfection du | sa volatilité, & le fixer.
|
Magistère, qu'à lui donner | Qu'il faut faire sortir la
|
le régime du feu, pour | Composition de la noirceur,
|
en faire la digestion, & | & chasser la mort
|
pour rendre Manifeste ce | des fèces, c'est-à-dire que
|
qui est Occulte: c'est-à-dire, | de la corruption, la Matière
|
pour faire paraître la | vienne à la perfection,
|
couleur de l'Or, qu'elle | qu'elle soit vivifiée,
|
renferme au dedans; puisque | & qu'elle passe de la mort
|
l'Or pour être dissout, | à la vie. M. Salomon.
|
ne perd rien de sa premiè- |
|
@
CHAPITRE VI. 57
----------------------------------------
T R A D U C T I O N D U C H A P I T R E
sixième par Joli.
I L faut que vous rendiez grâces à Dieu,
qui donne cette Science à tout Sage,
qui nous délivre de misère & pauvreté.
Remerciez-le de tous ses dons, & grands
miracles qu'il a mis en cette Nature, & le
priez que pendant que nous vivons nous
parvenions à lui. En après, mon Fils, les
Onguents, desquels nous extrayons ès
Livres des Auteurs, sont écrits d'Ongles,
Poils, Leton vert, Tragacanthes & Os.
Outre plus il nous faut exposer la disposition
de l'Onguent qui coagule les Natures
fugitives, & orne les Soufres
& les préfère
à tous autres Onguents parfaits. Car nous
savons l'essence de son vase, & combien
il est précieux, qui est appelé divin Soufre
& figures aux autres Onguents, qui est
l'Onguent occulte & enseveli, duquel il ne
se voit aucune disposition, & habite en son
Corps, comme le feu dans les Arbres &
Pierres, qu'il nous faut extraire par un Art
& entendement subtil, sans combustion
aucune.
Sachez, mon Fils, que qui ne connaît
point la différence, ne connaît pas si
bien les deux Soufres. Non pas que les Onguents
qui se subliment des Pierres soient
@
58 LES SEPT CHAPITRES.
Soufres, pour accomplir la Teinture. Or les
deux mêlés avec leurs Corps, il s'en fait un
parfait. Et faut savoir que deux Soufres
teignent; mais ils s'enfuient, lesquels il faut
fort bien séparer, & les retenir de leur fuite.
Et sachez que le Ciel se joint médiocrement
avec la Terre, & le médiocre est figuré
avec le Ciel & avec la Terre, ce qui
est l'Eau. Et toute la première est Eau qui
sort de cette Pierre, & le second est vraiment
l'Or, & le troisième l'ordure; & le médiocre
est l'Or, qui est plus noble que l'ordure.
Or en ces trois sont la fumée, la noirceur,
& la mort. Il nous faut donc chasser
la fumée, qui est au-dessus de l'Eau, la noirceur
de l'Onguent, & des fèces la mort,
& ce par Dissolution. Ce qui étant nous
avons une très grande Philosophie, & le
secret des Secrets.
----------------------------------------
C H A P I T R E S E P T I E M E
E T D E R N I E R
F Ils des Philosophes, il y a sept Corps
ou Métaux, entre lesquels l'Or tient le
premier rang, comme étant le plus parfait
de tous; c'est pourquoi on l'appelle leur
Roi & leur Chef. [1]
[1] Tous les Philosophes | nombre des Métaux. Ceux
|
ne sont pas d'accord du | qui, comme notre Auteur
|
@
CHAPITRE VII. 59
La Terre ne saurait le corrompre; les
choses brûlantes ne le détruisent point;
l'Eau ne l'altère ni ne le change, parce
que sa complexion est tempérée, & qu'il
est également composé de chaleur, de
froideur,
de sécheresse, & d'humidité, & il
n'y a rien de superflu en lui. [1]
veulent qu'il y en ait sept, | est demeuré volatil, ils
|
y comprennent l'Argent- | s'en vont à la Coupelle, &
|
vif, qu'on appelle autrement | ne souffrent pas les autres
|
Mercure; mais | épreuves. Les imparfaits
|
quelques-uns soutiennent | se divisent en rouges &
|
que ce n'est pas un Métal, | en blancs. Les premiers
|
& qu'il est seulement | sont le Fer qu'on appelle
|
la Matière des Métaux: | Mars, & Vénus que l'on
|
parce que la définition du | nomme Cuivre ou Airain.
|
Métal, d'être un Corps | Les blancs sont le Plomb
|
minéral, composé d'Argent-vif | & l'Etain, qui sont appelés
|
& de Soufre, | Saturne & Jupiter.
|
dur, malléable & fusible, | Ceux qui mettent l'Argent-vif
|
ne lui peut convenir. | au nombre des
|
Et ceux-là ne reconnaissent | Métaux, disent qu'il a en
|
que six Métaux, qu'ils | lui les deux Teintures, la
|
appellent autrement Corps, | blanche & la rouge; la
|
pour les distinguer du Soufre, | première extérieure &
|
de l'Arsenic, & de | l'autre intérieure, & qu'il
|
l'Argent-vif, qu'ils appellent | est Androgyne ou Hermaphrodite,
|
Esprits. Les uns & les | c'est-à-dire, qu'il
|
autres les divisent en Métaux | a les deux Sexes, étant
|
parfaits & imparfaits. | mâle & femelle. M. Sal.
|
Les parfaits sont ceux à | [1] L'Or est composé
|
qui la Nature a donné une | d'un Argent-vif & d'un
|
fixité & une teinture parfaite, | Soufre très purs, parfaitement
|
qui sont l'Argent | digérés, & si exactement
|
& l'Or, qui demeurent à | unis, que l'un
|
toutes épreuves. Les imparfaits | est changé en la nature
|
sont ceux qui n'ont | de l'autre, son Argent-
|
pu atteindre à cette perfection, | vif étant véritablement
|
n'ayant qu'une | Soufre, & son Soufre Argent-vif:
|
teinture ébauchée, & qui | comme nous avons
|
n'est pas permanente; & | dit que dans la Composition
|
parce que leur Argent-vif | de l'Argent-vif la
|
@
60 LES SEPT CHAPITRES.
C'est pourquoi les Philosophes l'ont
préféré
à tous les autres, & ils l'ont fort
estimé, nous assurant que l'Or, par sa splendeur,
était à l'égard des métaux, ce que
le Soleil était entre les Astres par sa lumière,
qu'il a beaucoup plus éclatante que tous
eux.
Aussi comme c'est le Soleil, qui, par
la volonté de Dieu, fait naître & croître
tous les Végétaux, & qui produit & mûrit
tous les fruits de la Terre, l'Or contient
aussi tous les Métaux
en perfection [1]
Terre est Eau et l'Eau est | & de l'Argent vif, &
|
Terre. De sorte que l'Or | la diversité de leur Teinture,
|
étant homogène, c'est-à- | a fait deux sortes de
|
dire, les parties de l'Or | Métaux parfaits. L'Or étant
|
étant toutes de même nature, | le plus parfait de
|
il s'ensuit nécessairement | tous, par la pureté de ses
|
qu'il n'y a rien de | principes, & par sa fixité
|
superflu ni d'étranger en | & sa teinture, qui sont
|
lui. M. Salomon. | dans le dernier degré de
|
[1] Tous les Métaux étant | perfection [c'est-à-dire,
|
faits d'une même principale | aussi grande que la Nature
|
Matière, la Nature | l'a pu donner à cette commune
|
les aurait tous formés parfaits, | Matière de tous les
|
si elle n'en avait pas | Métaux] & qui ne peuvent
|
été empêchée par les impureté | être détruites ni corrompues
|
& les mauvais Soufre, | par nul Agent naturel
|
dont cette Matière a | ni artificiel, quelque
|
été infectée dans les Mines. | violent qu'il puisse être;
|
Ce qui a fait la différence | il est évident que l'Or
|
& la pluralité des Métaux | contient tous les autres
|
imparfaits, selon le divers | Métaux en perfection, &
|
mélange de ces impuretés | qu'il est à leur égard ce
|
& de ce mauvais Soufre avec | qu'est le soleil entre les
|
un Argent-vif impur, | Astres, comme le dit notre
|
& plus ou moins volatil. | Auteur. M. Salomon.
|
La moindre ou la plus |
|
grande pureté du Soufre |
|
@
CHAPITRE VII. 61
C'est lui qui les vivifie, parce que c'est lui
qui est le Ferment de l'Elixir, & sans lui
l'Elixir ne peut être parfait.
Car de même que la pâte ne saurait
être fermentée sans levain; ainsi quand vous
aurez sublimé le Corps, que vous l'aurez
nettoyé, que vous aurez ôté aux fèces la
noirceur qui les rendait désagréables, afin
de joindre & unir ce Corps & ces fèces ensemble,
mettez-y du Ferment, & de la Terre
faites-en de l'Eau, jusqu'à ce que l'Elixir
devienne Ferment, comme la pâte devient
levain,
par le levain que l'on mêle avec
elle.
Que si vous considérez, & que vous
examiniez bien la chose, vous trouverez
que le Ferment que l'on doit ajouter à
l'Oeuvre, ne se doit prendre d'autre chose
que de ce qui est de sa propre nature.
Car ne voyez-vous pas que le levain ne se
prend que de la pâte,
qui a été fermentée?
Et remarquez que le Ferment blanchit la
Composition: il empêche qu'elle ne se
brûle; & retient la Teinture, & la rend fixe
& permanente; il réjouit les Corps; il les
unit ensemble, & les faits entrants & pénétrants.
[1]
[1] Il y a dans le Latin, | qu'il eût fallu lire, de aurat
|
Et nota quod fermentum | c'est à dire doré, au lieu de
|
confectionem dealbat. | dealbat qui veut dire blanchit.
|
J'aurais crû qu'il y aurait | Parce que tous les
|
eu faute en cet endroit, & | Philosophes assurent que
|
@
62 LES SEPT CHAPITRES.
Et c'est là la clef des Philosophes, & la
fin à quoi se terminent toutes les Opérations
qui se font dans l'Oeuvre. C'est par
le moyen de cette Science, que les Corps
sont rendus plus parfaits qu'ils n'étaient,
& qu'avec l'aide de Dieu l'Oeuvre est accomplie,
comme c'est par le mépris & la
mauvaise opinion que l'on a de ce Ferment,
c'est l'Azoth, c'est-à-dire | par ce mot Ferment, il entend
|
leur Eau ou premier Mercure, | le second Mercure,
|
comme l'explique | étant certain, comme Geber
|
Artéphius, qui blanchit | le prouve dans sa Somme,
|
le Laiton. Voici ses paroles, | & comme l'assurent
|
Nihil est quod à | les autres Philosophes,
|
Corporibus perfectis, id | que ce n'est que le Mercure
|
est, à Sole & Lunâ colorem | ou Eau Mercurielle, qui
|
possit auferre, nisi | empêche la combustion;
|
Azoth, id est, Aqua nostra, | puisque c'est l'Argent-vif,
|
quae colorat & album | tout impur qu'il soit, qui
|
reddit Corpus rubeum, | dans les Métaux imparfaits;
|
secundùm regimina | empêche qu'ils ne
|
sua. C'est-à-dire, Rien | soient brûlés & consumés
|
ne peut ôter la couleur au | par le feu, lorsqu'ils se fondent,
|
Soleil & à la Lune, qui | ou qu'ils demeurent
|
sont les deux corps parfaits, | longtemps rouges dans un
|
si ce n'est l'Azoth, je | fourneau. Ce que l'Auteur
|
veux dire notre Eau; qui | ajoute, dans ce verset,
|
selon les divers régimes, | que le Ferment unit les
|
teint & rend blanc le | deux Corps [car assurément
|
Corps qui est rouge. Mais | ils se servaient des
|
l'Auteur ajoute ensuite, | deux Corps] & qu'il les
|
combustionem vetat, c'est | rend pénétrants & entrants,
|
à dire empêche la combustion, | me fait croire qu'il parle
|
il veut dire que le Ferment | du premier Mercure, qui
|
empêche que la Composition | étant Esprit, spiritualise
|
ne se brûle. De sorte | les Corps, & les rend capables
|
qu'il semble que ce Philosophe | de pénétrer les
|
appelle ici Ferment | Métaux imparfaits, pour
|
ce que les autres nomment | en faire la transmutation,
|
Azoth. Ou du moins que | M. Salomon.
|
@
CHAPITRE VII. 63
que l'Ouvrage est gâté, & qu'il ne se fait
pas. [1]
Car ce qu'est le levain à la pâte, la présure
au lait, à l'égard du fromage,
qui s'en
fait & ce qu'est le musc dans les parfums,
la couleur de l'Or l'est assurément pour
[1] S'il n'y a point de | qui la veuillent connaître.
|
faute en cet endroit, l'Auteur | Les uns la veulent trouver
|
veut dire, que ceux- | en des choses étrangères, &
|
là ne peuvent jamais réussir | qui n'ont nulle affinité
|
à faire l'Oeuvre des | avec les Métaux & les autres
|
Philosophes, qui ne connaissent | dans l'Esprit Universel,
|
pas le Ferment | c'est-à-dire, de la manière
|
dont ils parlent, & qui ne | qu'ils le conçoivent,
|
l'emploient pas en leur | dans une pure imagination.
|
Ouvrage, parce que, comme | M. Salomon.
|
il a dit auparavant, l'Elixir | Mr. Salomon, qui, dans
|
ne se peut faire sans | toutes ses Remarques sur
|
lui, on doit dire la même | la Philosophie Hermétique,
|
chose, si l'on explique | fait paraître une érudition
|
le Ferment par le premier | profonde, semble,
|
Mercure des Philosophes, | par ce qu'il dit ici, que
|
que ceux-là ne feront jamais | l'usage qu'un vrai Philosophe
|
le Magistère, qui ne | fait de l'Esprit universel
|
connaissent ni la véritable | soit une chimère.
|
Matière ni comment se | Ce savant Médecin ignorait
|
doit faire la Composition | apparemment, comme
|
de ce Mercure: parce que | l'ignorent encore beaucoup
|
disent les Philosophes, c'est | de Gens, qu'il y a des
|
la clef de l'Oeuvre, sans | Aimants avec lesquels on
|
quoi il est impossible de la | attire cet Esprit Universel,
|
faire. Cependant sans parler | dont un habile Artiste extrait
|
des autres choses, qui | un Mercure, & un Soufre
|
doivent entrer en sa Composition, | & un Sel purement célestes
|
combien y a-t-il | desquels il compose
|
d'opinions fausses & erronées | un Dissolvant, qui réduit si
|
sur la Matière, dont | radicalement l'Or en ses
|
il se faut servir pour le faire? | premiers Principes, qu'il
|
Car quoi que les Philosophes | n'est plus possible de le
|
aient parlé fort | remettre en Corps, si ce
|
intelligiblement là-dessus, | n'est par la voie des Régimes
|
il y en a pourtant très peu | du grand Oeuvre.
|
@
64 LES SEPT CHAPITRES.
La Teinture rouge, & sa nature n'est pas
une douceur. [1]
C'est pourquoi de lui nous faisons la
Soie; c'est-à-dire l'Elixir, & de lui nous
avons fait la peinture dont nous avons écrit,
& nous teignons la boue du Sceau Royal, &
nous avons mis en elle la couleur du Ciel;
laquelle fortifie la vue de ceux qui la regardent.
[2]
L'Or est donc la Pierre très précieuse,
Réduction, dit l'Auteur | quand elle est dans la noirceur.
|
de la Lumière sortant des | Et c'est ce que Philalèthe
|
Ténèbres, que le Mercure | appelle le Plomb des
|
vulgaire ne saurait faire, | Philosophes qu'il dit qui est
|
parce qu'il a perdu sa | plus précieux que le plus
|
première simplicité & pureté, | fin & le plus pur Or du
|
& qu'il a passé dans | monde. On teint cette boue
|
une autre Substance; étant | du Sceau Royal, quand par
|
devenu un Corps métallique, | la cuisson on lui donne cette
|
abondant en une humidité | couleur éclatante, qui
|
superflue, & en | brille dans le vaisseau, &
|
une lividité, qui le rendent | qui le fait paraître tout doré,
|
incapable d'opérer | dit Philalèthe, avant
|
une véritable Réduction | que d'être Elixir parfait.
|
de l'Or. Cependant, selon | Mais il faut que la Matière
|
Géber, on peut l'en rendre | ait passé auparavant par
|
capable. | la couleur du Ciel. Il veut
|
[1] Je crois que notre | dire, par la couleur blanche
|
Auteur, par toutes ces manières | brillante, s'il prend
|
de parler, fait allusion | ce mot de Ciel figurativement,
|
à des choses qui se | comme il a fait ci-
|
trouvaient dans les Livres | devant, pour le premier
|
des Philosophes: comme | Mercure. Ou pour la couleur
|
ce qu'il avait dit des Onguents | verte & azurée, qui
|
qu'ils tiraient des | est la couleur que l'on attribue
|
poils, des ongles, &c étaient | ordinairement au
|
des façons de parler | Ciel, & qui est effectivement
|
des Anciens. M. Salom. | fort agréable à la
|
[2] l'Auteur appelle ici | vue. Ce qui est plus vraisemblable.
|
boue la dissolution de l'Or, | M. Salomon.
|
@
CHAPITRE VII. 65
qui n'a point de taches, & qui est tempérée.
Et ni le Feu, ni l'Air, ni l'Eau, ni la
Terre ne sauraient corrompre ce Ferment
universel, lequel, par sa composition tempérée,
rectifie & met tous les Corps imparfaits,
en une justesse & température modérée
& égale
en les transmuant en Or. Et
ce Ferment est jaune, ou est véritable orangé.
L'Or des Sages étant cuit & bien digéré,
[1] par le moyen de l'Eau ignée, ou
de l'Eau-feu, fait & compose l'Elixir. Car
l'Or des Philosophes est plus pesant que le
Plomb, & par sa composition tempérée
& égale, il est le Ferment de l'Elixir. Comme
au contraire, ce qui n'est pas tempéré
est fait par une composition inégale.
Au reste, le premier Ouvrage se fait du
Végétable, & le second de l'Animal, dont
nous avons un exemple (dans l'oeuf de Poule,
duquel se forme le Poulet,) des Eléments
qui s'y voient visiblement. Et notre Terre
est Or, duquel nous faisons la Soie, qui
est le Ferment de l'Elixir.
[1] Les Philosophes appellent | que l'Azoth, & le Feu suffisent
|
l'Or vulgaire, leur | pour faire leur Magistère;
|
Or lorsqu'il a été dissous | donnant indifféremment
|
& vivifié par leur premier | le nom d'Azoth,
|
Mercure, & il ne manque | tant à cette Dissolution ou
|
à cet Or que la digestion, | second Mercure, qu'au premier,
|
pour être Elixir parfait. | qu'ils appellent Eau:
|
C'est pourquoi ils disent | Feu, ou Eau ignée. M. Sal.
|
Tome I. | F
|
@
66 LES SEPT CHAPITRES.
----------------------------------------
O B S E R V A T I O N.
Sur les motifs qui engagent à reconnaître
Hermès pour l'auteur des Sept Chapitres.
T ous ceux qui ont parlé des Sept Chapitres,
ou qui en ont cité quelque passage,
l'ont toujours fait sous le nom d'Hermès
Trismégiste, qui est aussi l'Auteur de la
Table d'Emeraude, & ce consentement
général de tous les Philosophes est une
preuve suffisante pour faire voir qu'Hermès
en est l'Auteur. Il s'y trouve néanmoins
des choses touchant notre Religion, qu'il
n'est pas vraisemblable qu'Hermès, au
temps qu'il a été (s'il en faut croire
Cédrénus,
qui le fait plus ancien qu'Abraham)
ait pu connaître si précisément qu'elles y
sont énoncées. Car il y est parlé du Jugement
final, que Dieu doit faire de tous
les Hommes, & de la damnation des Réprouvés,
qui sont deux choses lesquelles
ne se trouvent point dans l'Ancien Testament,
au moins n'y sont-elles pas si clairement.
Il est vrai que dans le
Pimandre,
l'Asclépius & les autres Ouvrages qu'on
attribue au même Hermès, les plus hauts
Mystères de notre Religion y sont aussi
clairement expliqués. Et c'est sans contredit
l'une des plus fortes raisons que
Casaubon
@
CHAPITRE VII. 67
allègue dans les Essais qu'il a faits contre
Baronius, pour prouver qu'Hermès n'en
est pas l'Auteur. Et en effet, quoi que selon
les Philosophes, leur Elixir, qui prend
naissance d'une Vierge, qui meurt après
avoir été élevé, & qui ressuscite ensuite
glorieux & tout spirituel de son tombeau,
soit un symbole & une représentation de
la Naissance, de la Mort, & de la Résurrection
du Sauveur. Je ne crois pas néanmoins
que
Bon de Ferare dans
sa Marguerite
précieuse, ni quelques autres Auteurs,
aient eu raison pour cela de dire que les
anciens Philosophes ont eu le Don de Prophétie,
& qu'ils ont connu la Naissance du
Verbe Eternel, le Jugement dernier, la
Trinité, & les autres Mystères de la Religion
Chrétienne. Si ce n'est qu'on voulût
dire que Dieu eût révélé ces Mystères aux
Philosophes, que son Peuple ne connaissait
pas si clairement, comme il leur avait révélé
une Science si merveilleuse & si cachée
au reste des Hommes. On pourrait
encore douter qu'Hermès, que tous les
Philosophes, dont nous avons les Ecrits,
reconnaissent pour le Père de la Philosophie
Chimique, fût l'Auteur de ces
Sept
Chapitres, puisque celui qui les a faits parle
souvent des anciens Philosophes, qu'il
appelle ses Prédécesseurs; & qu'on sait
que c'est Pythagore (qui a été longtemps
F ij
@
68 LES SEPT CHAPITRES.
après Hermès, puisqu'il était du temps de
Tarquin, dernier Roi de Rome) qui le
premier prit le nom de Philosophe, c'est
dire, Amateur de la Sagesse, tous ceux de
sa profession ayant accoutumé avant lui de
s'appeler Sages. D'ailleurs ce Traité commençant
par ces paroles,
Voici ce que dit
Hermès, on pourrait présumer de là que
ce serait quelqu'autre Philosophe beaucoup
moins ancien, qui aurait fait un Recueil
& un Abrégé des Oeuvres d'Hermès, qui,
comme on sait, avait fait plusieurs Livres,
que cette Abbréviateur aurait réduit en ces
Sept Chapitres. Outre que dans les
Allégories,
imprimées après la Tourbe Latine,
au cinquième volume du Théâtre Chimique,
il y a des passages entiers cités
d'Hermès, qui sont semblables à d'autres,
qui se trouvent dans les
Sept Chapitres, &
qui sont mêmes plus amples & plus étendus.
Mais il n'est pas difficile de résoudre
ces difficultés. Car pour ce qui est du nom
de
Philosophe, qui se trouve en plusieurs
endroits des
Sept Chapitres, il est certain
que ceux, qui ont traduit ce Traité, se
sont servis de ce mot (qui ayant paru plus
modeste, avait été communément reçu depuis
Pythagore) au lieu de celui de
Sage,
qui était plus vain, & qui n'était plus usité
de leurs temps, quoi que ce mot de
Sage
se trouve aussi en ce Traité. Et quand les
@
CHAPITRE VII. 69
Philosophes reconnaissent Hermès pour
l'Auteur de la Philosophie Chimique, ils
veulent dire sans doute, qu'Hermès est celui
qui en a écrit le premier, ou qu'il est
l'Auteur le plus ancien dont les Ouvrages
soient venus jusqu'à eux. Que si le premier
de ces
Sept Chapitres commence pas ces
mots,
Voici ce que dit Hermès, tant s'en
faut qu'il ne soit pas de lui, qu'au contraire,
c'est une preuve qu'il en est véritablement
l'Auteur; puisque l'on sait que c'était
la manière d'écrire des Anciens. Car,
sans parler des Prophètes, qui ont commencé
leurs Livres de la même manière,
les Proverbes & l'Ecclésiaste commencent
ainsi. Le premier,
Les Paraboles de Salomon,
Fils de David, Roi d'Israël: & le
dernier,
Voici les Paroles de l'Ecclésiaste,
Fils de David Roi, de Jérusalem. Et Hérodote,
le premier Historien des Grecs, &
que pour cette raison Cicéron appelle le
Père de l'Histoire, n'a-t-il pas commencé
Clio ou son premier Livre de cette sorte,
Voici l'Histoire qu'Hérodote d'Halicarnasse
a mis en lumière. Pour ce qui est des passages
qui se trouvent semblables dans les
Allégories & dans ce Traité, il n'y a nul
inconvénient qu'un même Auteur dise les
mêmes choses en divers Traités, & qu'il
les dise même un peu diversement, &
qu'ainsi l'expression en soit ou plus étendue,
@
70 LES SEPT CHAPITRES.
ou plus resserrée. Mais il se peut faire
aussi que cette diversité ne provient que de
la faute, ou que de l'ignorance des Copistes,
qui ont mal écrit, ou qui ont abrégé
les passages du même Livre. Quoi qu'il
en soit (car je ne veux point m'engager
ici dans une dispute qui serait d'une trop
longue discussion, qui serait difficile à débrouiller,
& qui ne servirait de rien) ou
qu'Hermès soit l'Auteur de ce Traité,
comme la tradition & l'autorité des anciens
Philosophes le veulent, ce qui suffit
pour le persuader: Ou bien que quelque
Philosophe Chrétien l'ait fait sous le nom
d'Hermès ou qu'il y ait seulement ajouté
ce que nous venons de dire touchant
notre Religion, à quoi il y a plus d'apparence:
il est sans doute que c'est l'Ouvrage
d'un véritable & fort ancien Philosophe,
puisque les Auteurs les plus anciens
que nous ayons le citent comme tel, qu'il
est dans l'approbation générale, & qu'il
ne faut que le lire pour le connaître. Voilà
ce que dit Mr. Salomon pour favoriser
l'opinion de ceux qui prétendent que ces
Sept Chapitres ont été composés par Hermès,
contre le sentiment de ceux qui pensent
que ce Traité n'est pas de la composition
de ce Philosophe: Et voici ce que
le Président d'Espagnet à écrit avant M.
Salomon pour convaincre d'erreur ceux
@
CHAPITRE VII. 71
qui refusent de reconnaître Hermès pour
l'Auteur de ce même Traité. La différence,
dit-il, qu'il y a entre la Philosophie vivante
des Herméticiens, & la Philosophie
morte des Païens, est que la première a
été divinement inspirée aux premiers Maîtres
de la Chimie, cette Reine de toutes
les Sciences, qu'elle ne reconnaît pour
son Auteur que l'Esprit-Saint de la Vérité,
lequel soufflant où il lui plaît, verse dans
les Esprits la véritable Lumière de la Nature,
par laquelle les ténèbres de l'Erreur
sont dissipées: Et que la seconde doit son
invention aux Païens, qui négligeant &
abandonnant les Sources pures de la Doctrine,
ont introduit pour véritable des Principes
faux, qui ne sont que les productions
de leur imagination au grand dommage
de la République des Lettres. Mais, que
pourraient produire de bon Ceux qui n'ont
jamais été éclairés d'aucun rayon de la Sagesse
éternelle de Dieu, qui n'ont jamais
connu
Jésus-Christ, Source de toute science
& de toute intelligence? Il ne faut donc
pas être surpris de ce qu'ils n'ont rien établi
de solide, & de ce qu'ils nous ont débité
des rêveries & des fictions, dont ils
ont tellement défiguré la Philosophie sacrée,
qu'on ne retrouve plus en elle aucun
trait de sa première beauté. Vous
m'objecterez qu'Hermès même, le Prince
@
72 LES SEPT CHAPITRES.
de notre Philosophie vivante, a été Païen,
& qu'il a précédé de beaucoup de Siècles
des Auteurs, dont la Philosophie ne doit
aucunement être reçue. Que cela soit;
que s'ensuit-il de là? Hermès à la vérité
est né dans le Paganisme; mais, par un
privilège de Dieu tout particulier, il a été
tel que dans sa vie, dans ses moeurs & dans
sa Religion il faisait paraître parfaitement
le Culte du Vrai Dieu. Il reconnaissait
Dieu le Père, & disait qu'il ne faisait aucun
autre participant de sa Divinité. Il le
reconnaissait pour le Créateur de l'Homme.
Il reconnaissait aussi le Fils de Dieu
par lequel tout ce qui est créé, a été fait
universellement, & dont le Nom, comme
merveilleux & ineffable, était inconnu
aux Hommes, & même aux Anges,
qui admiraient avec étonnement sa génération.
Que veut-on davantage? Tel a été
notre Hermès, qui, par une grâce spéciale,
& par une révélation de Dieu très bon
& très grand, a prédit que ce même Fils
devait venir en chair dans les derniers Siècles,
afin de rendre les Hommes pieux éternellement
heureux. C'est lui, qui a enseigné
avec clarté le Mystère adorable de
la très sainte Trinité, tant selon la pluralité
des Personnes, que selon l'unité de l'Essence
Divine en trois Hypostases, comme ceux
qui ont tant soit peu de discernement e
d'intelligence
@
CHAPITRE VII. 73
d'intelligence pourront le conjecturer par
les choses suivantes; car à peine le peut-
on trouver ailleurs plus ouvertement & plus
clairement. De la
Lumière intelligente,
dit-il, qui a été de toute éternité, a procédé
une Lumière intelligente, & cette
Lumière intelligente, ou cet Entendement
lumineux, est aussi éternel que son Principe,
en ayant procédé de toute éternité, &
n'étant rien autre que sa Vérité & son Esprit,
qui embrasse & contient toutes choses.
Hors de lui, il n'y a point d'autre
Dieu, point d'Ange, ni aucune Essence;
car il est le Seigneur de toutes choses, &
le Père & le Dieu de toutes les Créatures.
Toutes choses sont au-dessous de lui & en
lui. Je t'atteste, ô Ciel! qui est le sage
Ouvrage du grand Dieu: Je t'atteste, Voix
du Père, toi qu'il proféra pour la première
fois, lorsqu'il forma le Monde: Je t'atteste
par la Parole uniquement engendrée
du Père, & par le Père même, qui contient
toutes choses, & lequel je réclame
pour qu'il me soit propice & favorable.
Feuilletez maintenant autant qu'il vous
plaira, chers Enfants d'Hermès, & lisez
jour & nuit les Livres des Philosophes
Païens, vous verrez si vous y trouverez des
choses si saintes, si pieuses & si chrétiennes.
Notre Hermès a été Païen, je l'avoue;
mais ç'a été un Païen qui a connu la puissance
Tome I. * G
@
74 LES SEPT CHAPITRES.
& la grandeur de Dieu, tant par soi-
même que par les autres Créatures. Il a
glorifié Dieu en tant que Dieu; & même
je ne ferai point de difficulté de dire qu'il a
de beaucoup surpassé par sa piété plusieurs
Chrétiens, qui ne le sont que de nom, &
qu'il a rendu à Dieu, comme à la Source
de tous les biens, des grâces & des remerciements
pour les bienfaits reçus, avec
une profonde soumission & tout autant
qu'il l'a pu. Apprenez du Prophète, ô Amateurs
de la Doctrine, si Dieu n'a pas
conversé & agi parmi les Gentils aussi bien
qu'avec son Peuple, quand il s'exprime
ainsi: Depuis le Soleil levant jusqu'au Couchant
mon Nom est grand entre les Nations;
par tout on sacrifie & l'on offre en
mon Nom des Oblations pures, parce que
mon Nom est grand parmi les Nations,
dit le Dieu des Armées. Rappelez, je
vous prie, dans votre mémoire, & nous
dites si les Mages qui vinrent d'Orient,
conduits par une Etoile, pour adorer JESUS-CHRIST,
n'étaient pas Gentils, & si son
Peuple lui-même ne l'a pas attaché sur la
Croix? Voyez, fidèles Nourrissons de la
véritable Sagesse, la différence qu'il y avait
d'Hermès aux autres Gentils qui n'avaient
pas ses sentiments, & quelle est la Source
d'où ils ont puisé les fondements de leur
Doctrine. Cherchez diligemment dans leurs
@
CHAPITRE VII. 75
Ecrits, & vous verrez que ces Philosophes-là
ne rapportent pas à Dieu les Principes
de leur Science, mais qu'ils pensent
seulement les avoir acquis par leurs études
par leurs travaux. Au contraire, si vous
jetez les yeux sur le commencement de
l'excellent Traité de votre Père Hermès,
contenant
Sept Chapitres, dans lesquels il
parle du Secret de la Pierre Physique, vous
y verrez avec quels sentiments de piété il
parle de Dieu, Distributeur de cette Science
secrète; car il s'exprime de cette sorte:
Pendant tout le cours de ma vie je n'ai cessé
de faire des expériences, & je n'ai jamais
donné de relâche à mon esprit dans le travail.
J'ai eu cet Art & cette Science par
l'inspiration de Dieu seulement, qui a daigné
me la révéler comme à son Serviteur.
Il donne à ceux qui se servent de leur raison
la liberté de juger de cette Science,
& il ne met personne dans l'occasion de s'y
tromper. Pour moi, si je ne craignais le
jour du Jugement & la damnation de mon
âme, pour avoir caché cette même Science,
je n'en écrirais en aucune manière,
& je n'en révélerais aucune chose à qui
que ce pût être; mais j'ai voulu rendre aux
Fidèles ce que l'Auteur de la Foi a daigné
me départir. C'est ainsi que parle Hermès,
& je ne pense pas qu'on puisse rien proférer
de plus raisonnable & de plus conforme
G ij
@
76 LES SEPT CHAPITRES.
à la Religion Chrétienne. Et c'est pour cela
que tous les Esprits les plus sublimes,
qui sont & qui ont été, ont embrassé cette
Philosophie vivante, sacrée & divine
d'Hermès de tout leur coeur, de toute leur
âme & de toutes leurs forces, & qu'ils ont
rejeté la Doctrine morte, profane & humaine
des Gentils. Par ce discours du Président
d'Espagnet, qui appuie celui de M. Salomon,
on peut raisonnablement attribuer
à Hermès les
Sept Chapitres dont il s'agit
ici & se persuader, selon sa Doctrine,
que la connaissance de la Pierre des Philosophes
vient immédiatement de Dieu, dans
la recherche de laquelle nous travaillons
inutilement, si nous ne méritons par la
prière & par une vie pure, qu'il nous conduise
comme par la main dans les détours
d'un Labyrinthe, où nous ne saurions que
nous égarer sans son secours.
@
@